L’horreur économique
Viviane FORRESTER, Fayard, 1996, 215 p.
« Sur un ton totalement neuf, Viviane Forrester, dans une analyse très documentée dénonce les discours habituels qui masquent les signaux d’un monde réduit à n’être plus qu’économique » nous explique la page 4 de couverture. Alléché par une telle annonce, je me suis plongé dans l’ouvrage. Mais, il n’est guère facile de suivre le cheminement de l’auteur tout au long des. Ca part un peu dans tous les sens. Il faut aller un peu « à la pêche » pour distinguer des pistes néanmoins intéressantes.
Il en va ainsi de cette réflexion sur le fait que ce n’est pas le chômage en soit qui est le plus néfaste mais la souffrance qu’il engendre. Ou encore la dénonciation de ces réseaux économiques privés, transnationaux qui dominent de plus en plus les pouvoirs étatiques. Concernant les jeunes de banlieues, l’auteur déplore qu’ils soient ligotés au sein d’un système rigide, vétuste, qui leur impose exactement ce qu’ils refusent en l’occurrence une vie liée au salariat et dépendante de lui. Cependant, rajoute-t-elle, nous en sommes encore à tenter de rafistoler un système périmé.
Autre observation de bon sens: « La vocation des entreprises n’est pas d’être charitable. La perversité consiste à les présenter comme ces ’’forces vives’’ qui suivraient d’abord des impératifs moraux, sociaux, ouverts sur le bien-être général, alors qu’elles ont à suivre un devoir, une éthique certes, mais qui leur commandent de faire du profit » (p.120)
E.S.Phelps, économiste et professeur à l’université de Columbia condamne le système de protection sociale européen qui évite certes la délinquance mais réduit l’incitation à la recherche d’emploi. Viviane Forrester réplique vertement: « Monsieur Pelphs doit savoir que le problème n’est pas d’inciter à chercher un emploi mais de permettre d’en trouver » (p.135)
« Sus aux immigrés qui entrent, bon vent aux capitaux qui sortent » déplore-t-elle par ailleurs à la p.142.
Ces quelques citations pertinentes sont malheureusement noyées dans un discours assez bavard et pour tout dire plutôt ennuyeux. Dommage, car le sujet est d’actualité et mérite mieux qu’un traitement aussi superficiel.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°390 ■ 20/03/1997