Le parcours judiciaire de l’enfant victime
ATTIAS Dominique et KHAÏAT Lucette, Ed. érès, 2015, 273 p.
La loi de 1998 prévoit que la déposition de l’enfant victime soit filmée et enregistrée, afin d’éviter la reviviscence du traumatisme qu’entraîne a répétition du récit. Mais, les magistrats instructeurs l’auditionnent systématiquement, sans parfois même avoir pris connaissance de l’enregistrement. La loi de 1999 étend les prérogatives de l’administrateur ad’hoc, le mandatant pour représenter le mineur en justice, quand l’autorité parentale complice ou auteure de l’agression ne peut jouer ce rôle. Mais, trop souvent cette fonction s’exerce d’une manière fictive, simple boite aux lettres entre juridictions et avocats. La loi de 2013 permet la présence d’un tiers lors de l’audition du mineur, à sa demande. Mais, cela se concrétise rarement. Depuis une trentaine d’années, de vrais progrès ont été réalisés : spécialisation au sein des barreaux dans la défense des mineurs victimes et formation tant des enquêteurs, que des magistrats ou des avocats au dialogue avec l’enfant. Comment se fait-il alors que la justice blesse l’enfant, en croyant le protéger ? Parce que le petit d’homme n’est pas un adulte en miniature et que les procédures traditionnelles ne lui sont pas adaptées. Le temps qui lui est propre n’est pas celui de la justice : attendre quatre ou cinq ans pour que son agresseur soit jugé n’a pas grand sens, quand une fragile maturité ne permet ni de se projeter, ni de temporiser. Le statut de victime n’existant pas dans le code pénal, il faut attendre la condamnation de l’agresseur pour être reconnu comme tel. Celui-ci appartenant le plus souvent à son cercle intime, révéler ce qu’il a commis fait peser sur elle toute la responsabilité de l’abjection. Il faut donc savoir se mettre à la hauteur de l’enfant et tendre l’oreille là où il veut bien nous parler.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1221 ■ 25/01/2018