Il y a loin de la coupe aux lèvres

La participation implique de s’engager, mais aussi d’en évaluer les effets induits. La sociologue américaine Sherry Arnstein a conçu en 1969 une échelle permettant de mesurer le degré d’association véritable des citoyens aux décisions. Le niveau le plus bas (n°1) relève d’une pure manipulation faisant croire qu’on écoute leurs avis, alors que ceux-ci n’auront aucune influence réelle sur les décisions et les résultats. L’exposition à titre décoratif (n°2) consiste à leur ménager une place bien visible, sans leur donner le moindre rôle significatif. Puis vient leur attribution à certaines fonctions symboliques (n°3) qui n’exercent toutefois aucune influence réelle. L’étape suivante se limite à une information et à la délégation de certaines tâches (n°4), sans qu’il y ait d’influence réelle sur la globalité du projet. La consultation suivie de retour (n°5) permet de mesurer l’impact des avis donnés, mais la gestion est toujours entre les mains des décideurs. Le processus de partage des décisions (n°6) implique une consultation, mais l’initiative continue à venir d’en haut. Quand le projet est conçu et géré par les citoyens, on est au stade 7. Enfin, la prise de décision en commun entre les différents niveaux de participation (n°8) indique un authentique partenariat. Ne pas s’en tenir donc à la déclaration formelle de la volonté de faire participer les usagers, mais mesurer ses modalités de concrétisation permettent de ne pas confondre instrumentalisation et appropriation du pouvoir d’agir. 

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1272■ 28/04/2020