Lutter contre ses propres préjugés, avant de le faire avec ceux des autres!

S’il est bien un comportement universel, ce sont les préjugés sur autrui. Pour la psychologie évolutionniste, ce comportement nous viendrait de l’instinct de survie acquis par nos ancêtres, il y a des centaines de milliers d’années. Il leur fallait alors évaluer tout de suite le degré de danger de la situation à laquelle ils étaient confrontés … pour savoir comment réagir et se protéger. Sans la transmission de cet automatisme, notre espèce n’aurait peut-être pas survécu. Aujourd’hui, ne sont présents que les héritiers des individus qui étant dotés de ce réflexe, le transmirent à leurs descendants (nous). Les autres ont disparu, sans laisser de descendants. Nous continuons à reproduire ces préjugés, autrefois vitaux, mais aujourd’hui sans grande utilité quotidienne. Sauf dans quelques cas extrêmes, comme pour sortir d’un bâtiment en feu, éviter d’un coup de volant un accident ou s’éloigner d’un lieu où se déclenche une bagarre. Ce qui, convenons-en, n’est pas non plus notre quotidien.

Pourtant, les préjugés qui nous irritent le plus, ce sont surtout ceux des autres. Les nôtres, nous rechignons à les reconnaître ou nous les ignorons. S’il n’est pas possible de s’en débarrasser, nous pouvons néanmoins apprendre à les identifier et à les maîtriser. Plutôt que de prendre exemple chez les autres, et si je me mettais d’abord à balayer devant ma porte ? Chiche … Allons-y !

Les valeurs de justice et d’égalité nourrissent en moi de puissants stéréotypes à l’encontre de cette poignée de plus riches qui, selon Oxfam, a augmenté sa fortune de 2 000 milliards en 2024. Je pousse à l’extrême ma révolte, en revendiquant à un impôt confiscatoire qui prendrait la forme d’un taux marginal de 90 % au-delà d’un certain revenu (comme cela se fit aux USA et en Europe jusqu’au début des années 1980). Ah, ce monsieur Tabaréz (ancien PDG de Peugeot) gagnant il n’y a pas si longtemps encore 100.000 euros par jour. Allez hop, 99 000 € de prélèvements destinés alimenter les caisses de l’action sociale de mon pays. Il lui en resterait quand même 30 000, ce qui est déjà faramineux quand on sait que le salaire moyen en France est de l’ordre de 2 500 euros net. Je sais, c’est utopique. Mais on a quand même le droit de rêver à plus de justice sociale.

Bref, quand l’opportunité s’est présentée d’entrer, il y a presque dix ans, au Conseil d’administration d’une association accompagnant les personnes sous-main de justice*, je me suis mis à côtoyer une poignée d’entrepreneurs. Certes, ce ne sont pas des milliardaires, mais quand même de ces acteurs économiques que j’ai toujours assimilés à ces patrons prédateurs, égoïstes, en quête de toujours plus de profits. Et là, je suis témoin de personnalités épris d’un bel humanisme, d’une grande générosité et d’une authentique sensibilité à la souffrance d’autrui. Voilà tous mes préjugés qui s’effondrent sur une catégorie sociale qui ne peut, pas plus que les autres, être essentialisée. Bien sûr, je ne suis pas pour autant devenu un sympathisant du MEDEF. Je continue à utiliser par dérision la caricature gauchiste en appelant à pendre le dernier patron avec les tripes du dernier bureaucrate ! Bien sûr, échapperaient toutefois à ce funeste sort, les patrons de ce Conseil d’administration qui ont gagné mon estime.

Comme quoi la connaissance des catégories qu’on exècre permet parfois de gagner en nuance, en modulation et en tolérance. Il a suffi pour cela que je rencontre de vrais patrons avec qui je partage bien des valeurs communes !

 

* https://www.assopermisdeconstruire.org/