Guerre à la drogue
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dans Billets d'humeur
L’actualité bruisse régulièrement d’une panique morale portant sur le narcotrafic et la mafia qui est en train de se structurer à son propos. Règlements de compte à répétition (110 morts et 341 blessés en 2024), montée de la corruption dans l’appareil d’Etat, généralisation à l’ensemble du territoire du marché des drogues etc… les faits sont là, peu contestables et pour le moins inquiétants.
Mais une fois de plus, la focalisation se fait sur les seules conséquences du phénomène et jamais sur les causes. Face aux spécialistes prompts à isoler LA raison, il convient d’évoquer une dynamique multifactorielle. Peut-être peut-on néanmoins s’appesantir sur deux causes possibles : la demande et le gain financier.
La demande
Il est fréquent de culpabiliser les consommateurs les rendant responsables indirects du trafic : sans consommateur pas de vendeur. Le principe vaut pour tout commerce, qu’il soit légal ou non.
Pourtant, les motivations qui conduisent à cet acte d’achat sont trop rarement explorées. Il est courant d’évoquer la seule réponse au mal-être, à la dépression, aux traumatismes subis. Mais, ce peut être aussi la quête de nouvelles expériences et sensations fortes, pour s’amuser et se détendre, pour appartenir à un groupe ou encore améliorer ses performances. Tout assimiler à la seule toxicomanie relève de l’abus. Adopter une seule et même réponse face à ces différentes intentions est non seulement une erreur, mais relève en outre de la pire des hypocrisies. Quand l’alcool provoque 45 000 morts par an, tout en étant validé, valorisé et promu par notre société, quelle crédibilité ensuite recouvre la chasse aux fumeurs de joints ? La légalisation des drogues que j’ai défendue il y a déjà trente ans constitue une option tout à fait entendable, alors qu’elle a quasi totalement disparu du débat public.
Le gain financier
Avec un chiffre d’affaires de 7 milliards d’euros, le narcotrafic brasse une masse énorme d’argent. Les principaux chefs profitent à plein de la fortune qu’ils retirent de leur commerce. Après tout leurs confrères du secteur du CAC-40 gagne en moyenne 404 fois le SMIC ! Mais, les petits dealers aspirent tout autant à une échelle moindre, à tirer profit du trafic auquel ils participent. Qu’est-ce qui peut donc ben inciter un jeune en échec scolaire, confronté à la pauvreté de sa famille, enfermé dans un ghetto urbain à s’engager dans une activité illégale ? Formuler ainsi la question, c’est y répondre ! Quelle perspective notre société donne-t-elle aux plus démunis pour les décourager d’emprunter la voie dangereuse d’un trafic aux illusions d’enrichissement rapide, mais d’espérance de vie des plus courtes ? La courte-vue et le populisme de nos responsables politiques nous mènera droit dans le mur. Continuons donc à utiliser massivement la répression et à ouvrir des prisons, tout en réduisant les amortisseurs de la protection sociale et des professionnels de son action, le résultat est connue d’avance. Il ne restera plus bientôt qu’une méthode à la Bukele, ce Président du Salvador qui a trouvé nla solution pour lutter contre les gangs de son pays : emprisonner tous les hommes tatoués ! A quand ‘l’incarcération de tous les fumeurs de joint ?