L’identitarisme, encore

Octobre rose, destiné à promouvoir le dépistage du cancer du sein, est né aux USA en 1985. Cette manifestation est importée en France en 1994. C’est l’occasion de sensibiliser sur un problème médical si longtemps tabou, comme bien d’autres problématiques de santé spécifiquement féminines. Ainsi ces règles douloureuses et autres manifestations de l’endométriose qu’il faudrait subir stoïquement, car prétendument inhérentes à la nature. Rendre publiques et surtout visibles ces affections est utile et légitime.

Pourtant, l’identification à cette cause porte un péché originel : trop souvent les hommes en sont exclus. Parce que ce serait un problème exclusivement féminin, il ne faudrait pas qu’ils s’en mêlent. Que l’organisation, la participation, la maîtrise de telles actions se concentrent entre les mains des principales concernées apparaît logique, tant il est fréquent de voir les mâles s’emparer du pouvoir. Mais pourquoi ne pas autoriser les individus de sexe masculin à manifester leur solidarité, de toutes les manières possibles et imaginables, quitte à toujours rester en retrait ? Car ils sont aussi concernés en côtoyant au quotidien leur mère, leur compagne ou leur fille atteintes du cancer du sein. Il y a là la même logique que pour les manifestations LGBT que certains voudraient interdire aux hétérosexuels, les réunions syndicales excluant non-racisés ou les hommes proscrits des rencontres féministes.

 Je ne suis pas juif et pourtant je me sens concerné par la lutte contre l’antisémitisme. Je ne suis pas palestinien, et pourtant je me sens concerné par le génocide perpétré à Gaza par le gouvernement d’extrême droiet israélien. Je ne suis pas homosexuel et pourtant je me sens concerné par la lutte contre l’homophobie. Ma peau est blanche et pourtant je me sens concerné par la lutte contre le racisme. Et je suis un homme, ce qui ne m’empêche pas de me sentir concerné par les souffrances vécues par les femmes. Non par pitié ou par miséricorde, mais au nom d’une valeur essentielle : la solidarité envers mes sœurs et frères en humanité qui subissent l’oppression, les discriminations ou les violences en raison de leurs différences ou leurs spécificités, quelles qu’elles soient.