Incivilités
On affirme facilement que notre jeunesse est effrontée et peu respectueuse de ses aînés. La réalité est bien plus complexe que cela.
Louise attend son bus. Elle se fait interpeller grossièrement par un collégien qui lance à ses copains : « venez voir le gros pif de la vieille ». La réplique est radicale : « je supporte mon nez depuis 70 ans et je m’en porte très bien. Mais dis moi, est-ce que ton zizi est aussi gros ? » Fou rire général sous l’aubette, l’adolescent indélicat rougissant jusqu’à la pointe des cheveux.
Mieux élevé qu’on le pense
Catherine a dépassé la cinquantaine, mais elle se sent en pleine forme. En sortant d’un commerce, elle est embarrassée par tous ses achats qui débordent largement de son sac. Cela n’échappe pas au Monsieur qui la suit et qui s’adresse alors à ses deux enfants de 9 et 10 ans : « vous allez aider la dame à transporter ses affaires, elle est trop vieille pour tout porter ». Protestations de Catherine : elle n’est pas si vieille que cela, pense-t-elle. Rien n’y fait. Ses deux jeunes porteurs l’accompagnent jusqu’à sa voiture, en lui expliquant : « papa a décidé de reprendre notre éducation en main ». Manque de savoir-vivre ou savoir-vivre maladroit, l’éducation est toujours entre le trop et le pas assez. Parfois, il est juste approprié. Été 2013, un petit lac, dans les Alpilles. Un groupe de jeunes zonards en camionnette arrive avec guitares et chiens, pour se baigner. Un des animaux s’ébroue à côté d’un vacancier. Sa jeune propriétaire chasse son chien et vient s’excuser. Plus tard, elle recueillera la crotte du toutou, avec un sac plastique. Mal élevée notre jeunesse ? Allons donc : on ne parle trop souvent que de celle qui choque, offense ou provoque et pas assez de celle qui se dévoue, s’investit et dynamise notre société.
Jacques Trémintin – Journal de L’Animation ■ n°143 ■ novembre 2013