Vocabulaire discriminant

Aliénés, anormaux, arriérés, boiteux, bossus, débiles, déficients, désavantagés sociaux, déviants, difformes, diminués, estropiés, handicapés, idiots, impotents, inadaptés, incurables, infirmes, incapables, invalides, malformés, mutilés, paralysés, paralytiques, personnes à mobilité réduite, personnes dépendantes, personnes en situation de handicap, tarés…(1) Que de mots et d’expressions pour tenter de circonscrire la différence et la distinguer de la « normalité ». On pourrait y rajouter : attardés, déséquilibrés, différents, éclopés, insensés, retardés … tant notre vocabulaire est riche d’expressions stigmatisantes. Le plus étonnant est que chaque époque a cherché à adopter de nouveaux vocables moins méprisants que les précédents. Mais, très vite, le sens commun a rattrapé ces nobles ambitions et le registre de l’insulte s’en est emparé. Dans les cours d’école, « idiot », « crétin » ou « débile » ont très vite été concurrencés par « gogol », « handicapé » et autres « triso ». Il n’est pas rare non plus d’entendre un homme politique en traiter un autre d’autiste (= perte de contact avec la réalité) ou de qualifier une attitude de schizophrénique (= faire une chose et son contraire). Dans tous les cas, ce qui est en jeu, c’est de rabaisser et déconsidérer l’autre. Mais, du même coup, on s’en prend à la dignité des personnes ne relevant pas de la norme, en les rejetant dans l’infra humain.

(1) « Travailler en SESSAD » Brigitte Jumeau, Dunod, 2012, p. 3

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1114 ■ 18/07/2013