Carte blanche à la Plume noire

Depuis la disparition de Lien Social, nous sommes nombreuses et nombreux à nous sentir orphelins. Les belles plumes qui alimentaient les billets tant de sa version papier que de son site ne devaient pas disparaître. Si rien ne remplacera jamais ce journal écrit par des travailleurs sociaux, retrouvez quelques un(e)s de ses chroniqueurs et chroniqueuses, chaque jeudi, dans la rubrique « carte blanche à …»

"Sociabilité"

Jusqu’à présent le néo libéralisme se contentait de pénétrer le monde du travail social à coups de mots aseptisés vidés de leur substance pour que rentre insidieusement dans les mentalités ce faux langage qui n’a pas le courage d’afficher ses visées anthropophages. Mais aujourd’hui, à la « Boîte Formation en Travail Social », un pas vient d’être franchi. Le nouveau directeur général fraichement embauché ne se contente pas d’user et d’abuser de ces mots, il les incarne.

Ignorant du travail social et diplômé d’une grande école « Business » il est la personnification même de l’entrée du modèle économique néo libéral au cœur des métiers de l’intervention humaine.

A la demande du conseil d’administration, certainement ébloui par le fait qu’il parle cinq langues, il doit redresser la barre de ce centre de formation fondé sur des bases pour le moins archaïques du modèle associatif. Le président du conseil d’administration se rend-il compte lorsque dans ses discours il en appelle à « la nécessité du travail social pour le bien de la société » qu’il vient de faire entrer le loup dans la bergerie. Un loup qui, avec l’arrivée de face d’endive au pouvoir, n’a cessé de se mettre en marche, un homme qui porte en lui les germes de la destruction de l’humain dont notre cher président de la République est le modèle de réussite absolue.

Le nouveau DG l’a annoncé dans son discours d’inauguration « Fini l’âge d’or du travail social », tout en insistant sur le fait que les formateurs étaient payés et bien payés pour faire ce qu’ils ont à faire, à savoir, pas grand-chose. Cela ne l’a pas empêché d’obtenir comme voiture de fonction une Tesla à 50 000 boules. L’ancienne directrice générale roulait en Clio, la loose. La salle prévue pour les repas ne s’appelle plus réfectoire, cuisine ou cantine mais « Salle de Sociabilité ». Oui la convivialité s’impose et doit s’afficher. Dans ce mouvement, tous les salariés sont « invités » une fois par an à participer à une journée incentive. Vous ne savez pas ce que c’est ? François Durand, formateur, lui non plus ne savait pas. Maintenant, il a compris. Le coup de la journée, 17 000 boules.

Pour le reste, moins d’argent mais grâce à l’intelligence collective nul doute que tous les collaborateurs dans leur volonté de relever ce défi seront être innovants et continueront de porter fièrement les valeurs de l’entre… pardon de l’association.