L'humour
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Quelle place peut prendre l’humour dans la relation à l’enfant ? Pour Olivier Reboul, « il est une attitude qui semble réellement propre à l'adulte. C'est l'humour. L'enfant en est incapable, sinon à son insu. L'adolescent connaît l'ironie, mais l'ironie n'est pas l'humour. » Jusqu’à la fin de son enfance, l’être humain ne serait en quel que sorte pas encore assez sûr de lui-même pour se moquer de ses propres faiblesses. L’introduire à l’humour n’est-ce pas alors une excellente manière de le faire grandir ?
Dans le film « La guerre du feu » (1), trois valeureux guerriers de la tribu pré-sapiens des Ulams partent à la recherche de la précieuse braise que leur communauté vient de perdre. Leurs aventures et les rencontres qu’ils vont faire seront l’occasion de nombreuses découvertes, dont la moindre ne sera pas… le rire. Présente sans doute depuis la nuit des temps, la capacité d’hilarité semble être une constante de l’espèce humaine. Certes, elle n’est pas comme le faisait dire Rabelais à son héros Gargantua « le propre de l’homme » (2) : des chercheurs n’ont-ils pas réussi à obtenir des gloussements, des secousses et des tortillements chez un rat qu’on chatouille derrière la nuque, sons qu’ils identifient au rire puisqu’il peut être associé au plaisir ? Toujours est-il que garder, développer ou retrouver ce potentiel, que ce soit dans le quotidien ou dans les épreuves (même et encore plus peut-être dans les pires d’entre elles) apparaît essentiel non seulement pour mieux vivre mais aussi pour prendre une nécessaire et salutaire distance par rapport à ce qui est vécu. Nous allons cheminer dans ce dossier, en partant du mécanisme physiologique du rire (et des ses nombreuses vertus), en continuant sur les différentes formes qu’il peut recouvrir (et notamment celle plus spécifique de l’humour), en terminant sur les limites auxquelles il se heurte (et jusqu’où il peut jouer un rôle tant éducatif que de liant social). Commençons donc par décrire ce qui se passe quand on rit …
« Une journée où l’on n’a pas ri est une journée perdue » (Voltaire)
Le rire déclenche un mouvement des lèvres et de la bouche qui produit dans le même temps des mimiques saccadées et des vocalisations diverses. De violentes inspirations et expirations créent des secousses et des vibrations qui se propagent dans tous les muscles du visage, dans le larynx, le diaphragme, la musculature abdominale et la cage thoracique. Quand le rire prend fin, une profonde détente envahit tout le corps qui se relâche, y compris les sphincters. Le rythme cardiaque qui avait augmenté lors de l'éclat de rire commence à diminuer en même temps que la pression artérielle. Cette manifestation réflexe qui peut être provoquée tant par des contacts physiques que par une évocation mentale semble aujourd’hui naturelle et bienfaisante (3). Il n’en fut pas toujours ainsi. Ecartons la proscription de l’Eglise qui y vit pendant longtemps une action maléfique : « nous n'avons point sur la terre, depuis le péché, de vrai sujet de nous réjouir » affirmait Bossuet. Prétendre rire dans la « vallée de larmes » relève de l'inconscience, et les pleurs sont plus appropriés à la misère de l'homme, continuait-il. (4). Plus généralement, rire -au même titre que pleurer d’ailleurs- fut longtemps considéré, comme un défaut : il ne fallait pas se laisser aller à ses émotions, mauvaises conseillères. On risquait alors de perdre le contrôle de son existence et se laisser mener par ses instincts. Aujourd’hui, même si l’exigence est moindre, il reste de bon aloi de rire avec retenue et discrétion.
« Le rire est une chose sérieuse avec laquelle il ne faut pas plaisanter » (Raymond Devos)
L’être humain a inventé de multiples façons de rire. Nous sommes tous amenés à les utiliser successivement, sans toujours en mesurer les effets. Apprendre à les distinguer doit nous permettre d’y avoir recours avec pertinence. Commençons par la pire : la moquerie. Cette pratique cherche à égratigner, voire à faire mal, en n’hésitant pas à utiliser le sarcasme et la dérision quand ce n’est pas la cruauté ou la méchanceté. Elle vise tout particulièrement les défauts physiques d’une personne, comme par exemple faire des remarques désobligeantes à un adolescent sur son acné. Autre forme, l’ironie qui consiste à dire le contraire de ce que l’on veut faire entendre, en cherchant à dévaloriser au travers d’une apparente valorisation. « Voilà une semaine qui commence bien » dit l’animateur à un groupe d’enfants qui, à peine arrivé au centre le lundi matin, commence déjà à se bagarrer. Il est encore une autre façon de rire, c’est la farce qui tourne en ridicule par le biais de la caricature, de la parodie ou de la mystification. Le moyen âge s’en était fait une spécialité, sous forme de courts récits consacrés à des thèmes récurrents et très populaires tels l’avarice, l’adultère, l’enivrement. L’histoire se terminait par une fin burlesque réservée au personnage central (l'épouse autoritaire se retrouvant dans un grand baquet d'eau ; le prêtre profiteur finalement dépouillé de ce qu’il convoitait …). Quel animateur n’a pas proposé à un groupe d’enfants de se cacher afin de faire croire à celui ou à celle qui sort tardivement du magasin de souvenirs, que le groupe l’a abandonné. Tout le monde guette alors le visage décomposé de la victime de la farce, jusqu’au moment où chacun surgit de sa cachette, de préférence en criant, afin de rajouter encore à la confusion de l’enfant ?
« L’humour est la forme la plus saine de la lucidité » (Jacques Brel)
Moquerie, dérision et farce sont parties intégrantes de l’arsenal du rire. Toute autre est l’humour qui se caractérise par cette manière très particulière de survoler une question, sans avoir l’air d’y toucher, mais en apportant parfois bien plus de sens que ne le ferait un discours sérieux et rationnel. Ce peut être une réflexion décalée, un mot d’esprit, un commentaire sur un détail. Le sujet abordé peut être grave, voire sinistre (la mort, la guerre, la misère…), mais aussi léger et futile. Le thème n’a guère d’importance : seule compte la façon de l’aborder. Le terrain de prédilection de l’humour, c’est bien l’univers des faiblesses et des fragilités humaines. Autant dire qu’il est sans limites. Les amuseurs savent mettre leur entourage de leur côté. Ils arrivent même à se sortir des situations les plus délicates en les retournant à leur avantage. Pour autant, celles et ceux qui l’utilisent à tout instant, cherchent parfois à camoufler leurs propres difficultés. Rire des autres leur est facile, accepter que l’on rit d’eux-mêmes l’est parfois beaucoup moins. L’humour a cette particularité de ne pas viser en priorité l’autre, puisqu’il peut tout autant s’adonner à l’autodérision. Il peut donc être un habile moyen pour désamorcer une tension et rétablir le contact quand celui-ci est rompu. Mais, employé mal à propos, il peut aussi au contraire provoquer une remontée d’agressivité. Il suffit pour cela que l’une des parties impliquées le ressente comme une moquerie. C’est là un moyen de communication à utiliser avec prudence et mille précautions.
« Une fois qu'on a passé les bornes, il n'y a plus de limites » (Alphonse Allais)
Ne pas froisser l’autre, quand on rit à ses dépends, pourrait être la frontière à ne pas dépasser. Mais à ce régime, ne risque-t-on pas d’interdire tout humour, la susceptibilité étant une caractéristique humaine particulièrement répandue ? Chacun d’entre nous possède ses propres limites en terme de sensibilité. Plus précisément, on trouve très réussi l’humour qui tourne en dérision l’autre et d’un bien mauvais goût celui qui nous concerne. L’émission « Culture Pub » programmé de 1987 à 2005 sur M6, proposa dans l’une de ses émissions de confronter un boucher, un huissier et un agriculteur, chacun de son côté, à des publicités présentant leur métier d’une manière guère avantageuse. Chacun n’eut pas assez de mots pour protester contre la caricature dont il était victime et qu’il jugeait inadmissible. Après avoir visualisé les petits films écorchant les autres corporations, les uns et les autres les trouvèrent très réalistes ! Au cours des derniers mois, une polémique qui s’est emparée de l’opinion publique, montre bien la complexité de la question : les caricatures de Mahomet parues dans la presse Danoise et reproduites dans « Charlie Hebdo ». Protestations véhémentes du côté d’un certain nombre de défenseurs des religions, outrés par l’irrespect du sacré qui traversait ces dessins. Lever de bouclier du côté des défenseurs de la liberté d’expression, se dressant contre une police des mœurs, une tentative de censure et de rétablissement de la loi anti-blasphème abolie par la Révolution. Jusqu’où peut-on donc aller ?
« Peut-on rire de tout ? Oui, mais pas avec n'importe qui ! » (Pierre Desproges)
Cette célèbre réplique de l’humoriste qui tenait alors le rôle du Procureur dans l’émission de France Inter « Le tribunal des flagrants délires » face à l’invité du jour, un certain Jean-Marie Le Pen, rejoint la réflexion de Guy Bedos rapportant les réactions de certains spectateurs assistant à son sketch « Vacances à Marrakech » : « Certains soirs, pendant et après le spectacle, j'entendais des rires qui me faisaient mal, genre : "Qu'est-ce que tu leur mets aux ratons !" » (5) Chacun d’entre nous possède sa propre sensibilité. Comment réagir face à un enfant qui rapporte une blague raciste entendue à la maison ? Comment se comporter face à un adolescent qui raffole des histoires drôles mais sexistes, portant sur les femmes en général et les blondes en particulier ? Comment répondre aux plaisanteries se moquant des handicapés ? Nous pouvons considérer qu’elles sont inacceptables et refuser d’en rire ou même de les écouter. La situation se complique dès lors que celui ou celle qui rapporte cette même histoire appartient lui-même à la catégorie qui s’y trouve raillée ! « Du moment qu’on rit des choses, elles ne sont plus dangereuses » affirmait Raymond Devos. Voire ! Ce n’est pas la même chose de rire d’une blague douteuse avec quelqu’un qui s’affirme ouvertement antisémite, homophobe ou raciste que de le faire quand elle est racontée par un juif, un homosexuel ou un homme de couleur … Savoir se moquer de soi-même, c’est aussi parfois savoir se protéger des blessures que l’on peut subir.
« L’humour est le plus court chemin d'un homme à un autre » (Georges Wolinski)
Pour autant, si l’utilisation de l’humour peut parfois dépasser les limites du tolérable, elle n’en garde pas moins une multitude d’avantages non seulement pour (r)établir l’équilibre personnel, mais aussi dans la relation à l’autre. Il est paradoxal de constater qu’un geste, qui chez beaucoup d’espèces animales, est signe d’agressivité (retrousser les lèvres et montrer les dents) constitue chez l’Homme un signe d’apaisement. Parce qu’il nous conduit à lâcher le contrôle de nous-même et la maîtrise de ce qu’il y a de plus authentique et de plus intime en nous, l’humour libère les tensions et nous invite à sortir de la bulle qui nous protège d’autrui. Mises à part encore une fois les situations où le (sou)rire est interprété comme une provocation ou une moquerie, en combien d’occasions ne permet-il pas de créer une connivence entre des inconnu(e)s témoins de la même scène ou du même bon mot. C’est toujours en contribuant à nous distancier des apparences et des conventions, qu’il nous aide à une salutaire prise de recul sur ce que nous vivons. Il nous incite à ne plus nous prendre tellement au sérieux, en nous permettant par le décalage et l'absurde, une prise de conscience de nous-même, de nos dérèglements ou de ceux de la société. Si cela ne fonctionne pas à tous les coups, l’humour réussit néanmoins très souvent à jouer un rôle cathartique dans les relations sociales, aidant à évacuer le stress accumulé, à régler les incompréhensions réciproques et à relativiser les conflits.
« Nul n'ira jusqu'au fond du rire d'un enfant » (Victor Hugo)
Toutes choses qui ne peuvent que faciliter tout particulièrement la relation à l’enfant. La communication entre les adultes et les plus jeunes de l’espèce humaine n’est pas toujours simple à établir. Combien de fois un enfant entend un propos sans toujours pouvoir ou vouloir le comprendre ? L’atout de l’humour c’est sa dimension de langage universel. Pour peu qu’on le rende accessible, il permet une compréhension bien plus efficace là où nombre d’explications pourtant rationnelles et particulièrement argumentées ne franchissent pas toujours le seuil de la conscience enfantine. Une réflexion faite avec esprit vaut parfois bien des conseils qui se veulent avisés. Et puis réussir à rire ensemble, c’est rabaisser ses défenses et méfiances réciproques, se situer sur la longueur d’onde de la tendresse et d’une certaine complicité, en abolissant ne serait-ce que pour quelques instants les barrières d’âge, de génération et de hiérarchie… C’est partager un même moment de bonheur. L’adulte qui sait quitter, quand il le faut, son ton parfois trop sérieux, grave et rigoriste pour adopter celui facétieux, plaisant et décontracté de l’humour, n’est-ce pas finalement quelqu’un qui sait replonger dans son âme d’enfant ?
(1) « La guerre du feu » Jean-Jacques Annaud, 1981, TF1 VIDEO
(2) « Gargantua » François Rabelais (1534) in Avis aux lecteurs
(3) www.humourdunet.com
(4) « Maximes et Réflexions sur la comédie » Bossuet (1694)
(5) « Je craque », Guy Bedos, Calmann-Levy, 1976.
Les animaux rient-ils ?
"Aristote fit ce constat : Aucun animal ne rit sauf l'homme". Mais un animal ne pourrait-il pas rire à sa façon ? Comme le suggèrent les récentes expériences de chatouillements de rats par des chercheurs américains ou, plus convaincants, les gueules enjouées des dauphins et des grands singes ? Darwin, en son temps, avait observé que les chimpanzés produisent des vocalisations semblables au rire humain quand ils jouent ou quand on les chatouille. En 1972, l'éthologue Jan van Hoof vit dans la mimique simiesque " figure détendue et bouche ouverte le précurseur du rire humain. La plupart des primatologues ont aujourd'hui un avis plus réservé : même si, comme les autres mammifères et certains oiseaux, les singes manifestent des aptitudes au jeu, on rechigne à leur attribuer un sens inné du comique "« Sciences et Avenir » Hors-Série, Le rire, juillet 1998
Le fou du Roi
S’il est bien une figure qui symbolise la liberté de rire, c’est le bouffon qui était chargé de divertir le roi. Sous réserve d’utiliser la satire, la plaisanterie, la moquerie, ce personnage disposait de la « liberté du fou », exprimant d'un ton grave des choses anodines et d'un ton de plaisanterie les choses les plus graves, ce qui lui permettait de dire la vérité sans craindre d'être puni. Tradition bien ancienne puisque la première trace de l’existence d’un fou du roi remonte à 449, époque où Attila l’utilisait déjà pour divertir ses convies. « Les plus grands rois les goûtent si fort que plus d'un, sans eux, ne saurait se mettre à table ou faire un pas, ni se passer d'eux pendant une heure. Ils prisent les fous plus que les sages austères, qu'ils ont l'habitude d'entretenir par ostentation… les bouffons, eux, procurent ce que les princes recherchent partout et à tout prix : l'amusement, le sourire, l'éclat de rire, le plaisir. » rapporte Erasme dans son « Éloge de la folie » (1509)
Rire pour mieux penser
« Les bons mots qui font rire ont le pouvoir de guérir les mauvais maux qui font souffrir » affirme le Docteur Donadieu. Le rire n’a pas qu’une fonction physiologique. Il semble être tout autant le produit de la prise de conscience de l’être humain sur son destin. « L’homme souffre si profondément qu’il a dû inventer le rire » expliquait Friedrich Nietzsche. « Nous n’avons pas assez de larmes pour tous les malheurs du monde, il faut bien rire de quelques uns d’entre eux. » continue Tony Duvert. « Nous savons que nous allons vers la mort et, face à cette occurrence inéluctable, nous n'avons qu'un instrument : le rire. » confirme Umberto Eco. Outre le bien-être physique intense qu’il provoque, le rire apparaît donc avoir une fonction existentielle essentielle qui va bien au-delà des trémoussements qu’il provoque.
Thomas Hobbes
« La passion du rire n’est rien d’autre qu’une gloire soudaine, et dans ce sentiment de gloire, il est toujours question de se glorifier par rapport à autrui, de sorte que lorsqu’on rit de vous, on se moque de vous, on triomphe de vous et on vous méprise. » (« Les éléments de la loi ») « La soudaine gloire est la passion qui produit ces grimaces qu'on nomme le RIRE. Elle est causée soit par quelque action soudaine dont on est content, soit par la saisie en l'autre de quelque difformité, en comparaison de laquelle on s'applaudit soudainement soi-même. Elle touche surtout ceux qui sont conscients qu'ils possèdent le moins de capacités, et qui sont obligés, pour se conserver leur propre estime, de remarquer les imperfections des autres hommes. Et donc, rire beaucoup des défauts des autres est un signe de petitesse [d'esprit]. Car l'une des tâches des grandes âmes est d'aider les autres et de les libérer du mépris, et de se comparer seulement aux plus capables. » (« Le Leviathan »)
Lire Interview : Manil Pierre - Humour
Vrai ou faux ?
Rire favorise la digestionVrai : Le rire a un impact positif sur l'appareil digestif. Outre la gymnastique abdominale qu'il provoque, il accélère la production de sucs gastriques et d'enzymes nécessaires à la digestion. De plus, il s'avère souverain pour toutes les affections intestinales psychosomatiques.
Faire rire un enfant avant de le coucher est le meilleur moyen de l’empêcher de s’endormir
Faux : Le rire régularise le sommeil, améliore ou supprime l’insomnie en épuisant la tension interne et en “purgeant” le système adrénergique d’éveil, laissant place à l’action de la sérotonine dont on sait qu’elle contrôle en partie les mécanismes du sommeil.
Rire peut permettre d’atténuer la douleur physique
Vrai : En stimulant le centre de l'hilarité situé dans le cortex, une petite zone du cerveau où se trouve aussi le siège de nos émotions, le rire agit sur la production de nombreuses hormones, dont celles qui donnent l'alerte aux anticorps chargés de défendre l'organisme contre les virus et les microbes, celles qui court-circuitent les processus inflammatoires, en particulier les inflammations articulaires, mais aussi celles qui possèdent une action antalgique (anti douleur) remarquable. En détournant l'attention, en relâchant les muscles et en déclenchant un « orage hormonal », le rire « anesthésie » les souffrances chroniques et capricieuses. Ses effets sont particulièrement spectaculaires sur les douleurs liées à la tension musculaire.
Ceux qui ne pensent qu’à rire ne font pas fonctionner leur intellect
Faux : les endorphines produites par le rire dans notre organisme ne se contentent de calmer les douleurs. Elles servent aussi à freiner la perte des neurones qu’induit le vieillissement. Les personnes dotées d'un sens de l'humour développé auraient donc la chance d'avancer en âge en gardant une mémoire intacte et un esprit de plus en plus vif.
Les mécanismes respiratoires du rire s'apparentent à ceux du yoga.
Vrai. Le rire entraîne une respiration plus ample, une pause respiratoire nettement plus longue qu'au repos. La durée de l'expiration peut, quant à elle, être doublée au cours du rire. Ces variations des temps respiratoires, qui rejoignent les préceptes de contrôle du souffle en yoga, multiplient par 3 ou 4 les échanges d'oxygène.
Le rire est signe de bonne santé.
Faux. Il devient pathologique lorsqu'il échappe au contrôle du cerveau. C'est le cas chez des patients qui présentent des lésions de certaines zones cérébrales (comme la sclérose en plaque). La maladie d'Alzheimer ou des maladies mentales comme la schizophrénie provoquent aussi des éclats de rire pathologiques.
Le rire a des contre-indications.
Vrai : Bien que rares, des contre-indications existent. Ce sont les suites d'interventions chirurgicales de l’abdomen telle l’appendicite. Mais, contrairement à ce que l'on pense, le rire est tout à fait conseillé aux cardiaques. Dans un premier temps, il augmente le rythme du coeur mais cette manifestation est vite suivie d'un ralentissement et d'une baisse de la tension artérielle très bénéfiques.
On rit aujourd’hui bien plus qu’on ne le faisait autrefois
Faux : en 1939 les Français riaient dix-neuf minutes par jour. En 1983, ils ne le font plus qu’à raison de six minutes par jour. En l'an 2000, ils ont passé en dessous de la barre de la minute quotidienne.
(Réalisé à partir de www.humourdunet.com; www.rireprimal.ch)
Bibliographie
► « Histoire du Rire et de la dérision » Georges Minois, Librairie Arthème Fayard, 2000
Le rire est une vertu que Dieu a donnée aux hommes pour les consoler d'être intelligents, disait Marcel Pagnol. Une vertu qui a plus de deux mille ans, comme en témoignent les recueils d'histoires drôles dont Grecs et Romains étaient déjà friands. Mais peut-on rire de tout ? Oui, affirme Démocrite, dont le rire désabusé a des accents étonnement modernes. Oui, dit aussi Cicéron qui répertorie mille façons de faire rire. Non, proclament en revanche les Pères de l'Eglise, car le rire est un phénomène diabolique, une insulte à la création divine, une manifestation d'orgueil. Leurs arguments ne sont cependant guère entendus au Moyen Age : les rois s'entourent de fous, les hommes jouent à se moquer les uns des autres lors des charivaris, et l'humour, qui n'est encore que parodie, se glisse même dans les sermons des prédicateurs. Avec Rabelais apparaît une autre façon de rire, un rire ambigu qui ébranle toutes les certitudes et se prolonge au-delà de la Renaissance, un rire tour à tour picaresque, grotesque, burlesque. La monarchie absolue veut faire rentrer les rieurs dans le rang. Mais peut-on domestiquer le rire ? Déguisé en humour acide, il ronge peu à peu les fondements du pouvoir et de la société. L'ironie devient un mode de relation de l'homme au monde. Elle protège contre l'angoisse et l'exprime en même temps. Le monde va désormais tout tourner en dérision, ses dieux comme ses démons.
► « La psychosomatique du rire » Dr Henri Rubinstein, Editions Robert Laffont, 1983
« Le rire, c'est la santé », cette vérité connue de tout temps est abordée dans ce livre d'une manière entièrement nouvelle et scientifique. Les explorations récentes concernant les « hormones du cerveau » permettent de comprendre comment le rire influe sur la santé, comment l'humeur et le moral influent sur l'évolution des maladies. Laissant aux psychologues les théories sur la nature du comique et de l'humour, l'auteur étudie, en médecin, ce qui se passe vraiment quand nous rions ; ce qui se passe dans notre corps, ce que sont l'anatomie, la physiologie et la neurobiochimie du rire. Le docteur Rubinstein parle également de l'utilisation thérapeutique du rire. Après avoir exposé dans son précédent ouvrage, Etes-vous spasmophile ?, certains des mécanismes fondamentaux de production des symptômes pathologiques, il explique, ici, comment le rire opère le « retournement » de ces mécanismes pathologiques, en quoi le rire est une thérapeutique majeure anti-stress, en quoi le rire établit le fonctionnement harmonieux de l'organisme et combat les maladies en réalisant un véritable "jogging" du corps et de l'esprit. À la lecture de ce livre, sérieux et documenté, mais dont l'humour n'est jamais absent, on se prend à regretter que les médecins méconnaissent trop souvent le rire, merveilleux outil thérapeutique, si utile... et si économique !
► « Le rire, sa vie, son œuvre » Robert Provine, Éditions Robert Laffont, 2003
Qu’y a-t-il de plus humain, de plus universel que le rire ? Mais, paradoxalement, qu’y a-t-il de plus méconnu ? Le rire est une composante centrale de notre vie, si centrale que nous avons tendance à oublier à quel point il est étrange – et son importance considérable. Neurobiologiste, Robert Provine étudie expérimentalement le rire depuis dix ans. Il répond ici à bien des questions, en proposant de découvrir ses curiosités et ses mécanismes. D’où vient le rire ? Pourquoi rit-on, et quand ? Pourquoi le rire a-t-il des effets analgésiques et euphorisants ? Pourquoi les gens qui parlent rient-ils plus que ceux qui les écoutent ? Pourquoi les femmes rient-elles davantage à propos des hommes que l’inverse ? Le lecteur apprendra ainsi les rapports étroits mais mystérieux entre le rire et le bâillement, le rire et les chatouillements, le rire et l’origine du langage. Il se laissera surprendre par le récit de l’incroyable épidémie de fou rire qui a secoué la Tanzanie pendant deux ans et demi, obligeant des dizaines d’écoles à travers tout le pays à fermer les unes après les autres, des semaines ou encore qu'à l'époque où on l'a découvert, le gaz hilarant était prisé dans certaines rencontres sociales, tout comme la marijuana aujourd'hui. Car rire en groupe, c'est drôlement meilleur. Le rire est une affaire trop grave pour être laissée aux seuls plaisantins...
► « Humour et éducation » DVD : échange entre Pierre Manil, Psychologue clinicien et Gérard Vincent Martin, Docteur en sciences du langage (2000).
Là où l’éducation adopte un discours trop souvent dichotomique, l’humour introduit une imprécision, une confusion et un doute entre le vrai et le faux qui permettent de critiquer les dysfonctionnement du système tout en restant lucide sur soi-même, et de remettre en cause le rapport à la norme tout en approchant d’une façon différente ceux qui rencontrent des difficultés dans le repérage des limites. Mais l’humour n’est pas l’ironie : le premier est fédérateur car proche de la problématique de chacun là où le second est plutôt agressif et dirigé contre une cible désignée. Dans le social, l’humour y est investi comme protection narcissique et façon de s’exonérer de la déception de certaines prises en charge particulièrement lourdes. Même si les gens joyeux et jubilatoires seront toujours suspects aux yeux de certains, c’est là un ingrédient fondamental d’un art de vivre que l’on retrouve sous une forme spécifique dans certaines corporations ou certaines cultures mais qui possède néanmoins une dimension universelle.
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Jacques Trémintin - Journal de L’Animation ■ n°82 ■ oct 2007