La prévention
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La prévention doit-elle faire peur, pour être efficace ?
La notion de prévention est devenue au fil du temps un concept central de notre société. On l’utilise à tout propos, bien au-delà de la santé à qui elle était appliquée initialement. Que recouvre ce concept ? Comment est-il mis en œuvre ? L’utilisation de la peur et de la culpabilisation est-elle efficace comme support de prise de conscience. L’animateur, en tant qu’interlocuteur privilégié des enfants et des jeunes, est confronté au quotidien tant à la nécessité qu’aux difficultés de faire passer ses discours de prévention. L’occasion dans le dossier de ce mois d’apporter quelques éclairages sur ces questions.
Pendant des millénaires, les rudes conditions d’existence ont confronté les êtres humains à la fragilité de la vie. Si les minorités privilégiées de la société arrivaient bien mieux à s’en sortir, l’immense majorité de la population était soumise à des aléas qui la mettaient en danger permanent. Jusqu’en 1900, la mortalité infantile ne put jamais aller en deçà de 150 décès pour mille (contre 3,6 pour mille en France, en 2005). Et il faut attendre 1800, pour que l’espérance de vie à la naissance commence à dépasser 30 ans (elle vient de franchir le seuil des 80 ans en 2007) ! Emilie Carles raconte dans ses mémoires (1) la grave chute qu’elle fit, alors qu’elle était enfant, accident qui la plongea pendant plusieurs jours entre la vie et la mort. Son père, paysan veuf d’une grande pauvreté n’hésita pas à la laisser pour se rendre au marché pour vendre ses maigres productions, seule source de revenus du foyer. Cette attitude ne doit pas être jugée à l’aune de ce que nous vivons aujourd’hui, mais à partir de ce qui se passait à une époque où la mort était fréquente, banalisée et acceptée avec fatalité : personne n’y pouvait rien. La moitié seulement d’une génération atteignaient l’âge de vingt ans. Peu d’enfants arrivaient à l’âge adulte avec ses deux parents encore vivants. Aussi se résignait-on, impuissant face à un sort que l’on pensait lié à la destinée ou à la volonté d’un quelconque Dieu. A l’origine de cette situation, il y a les guerres, les famines, les conditions de travail. Mais, la raison essentielle tient sans doute dans une société alors totalement démunie face aux microbes (bactéries, virus) et qui ignore à peu près tout de la nécessité des conditions d’hygiène.
De l’impuissance à l’espoir
Si cette maladie se traite aujourd’hui très bien grâce aux antibiotiques, entre 1347 et 1350, 25 millions de personnes succombent à la « peste noire », soit 30 % de la population européenne. La période contemporaine a vu s’éloigner le spectre de ces pandémies. La dernière en date remonte à 1918 : la grippe espagnole fait encore, toujours en Europe, selon les sources, entre 20 et 40 millions de morts. Pour autant, de nos jours, les régions les plus pauvres du globe restent largement exposées : le paludisme, la peste, la lèpre ou le choléra continuent de tuer considérablement en Inde, en Asie, en Afrique et en Amérique latine. Quant au Sida, sur les 40 millions de personnes infectées, 95% se trouvent dans les pays pauvres. Seuls 400.000, sur les 6 millions qui auraient besoin de façon urgente de traitements anti-rétroviraux, en bénéficient. Autant dire que le raisonnement que nous allons tenir tout au long de ce dossier n’est valable que pour un pays développé comme la France. Beaucoup d’autres nations sont encore confrontées à un déficit en matière de santé qui n’est pas sans rappeler ce que vivaient nos contrées autrefois. On peut espérer que les progrès considérables que l’occident a connus, bénéficieront rapidement au reste du monde. Cette évolution a permis de remplacer la conception fataliste qui y régna longtemps par un immense espoir : celui de pouvoir faire reculer le spectre de la mort, en réussissant à guérir les maladies, voire à les éradiquer.
Guérir et prévenir : un cheminement parallèle
La science médicale a su progresser, en quelques décennies, d’une manière vertigineuse : « la connaissance des structures cellulaires par le microscope, la biochimie, l'anesthésie, la microbiologie, la virologie, la vaccination, la génétique, l'immunologie, l'imagerie, la thérapeutique, donnent à l'homme l'impression d'une accélération foudroyante » explique Didier Sicard (2). Des médecins comme Pasteur en découvrant l’action des microbes identifient en même temps leur mode de propagation : la contamination. Les autorités sont très vite convaincues de la nécessité vitale des mesures d’hygiène. Une nouvelle culture va se généraliser : assainissement des villes (destruction des quartiers insalubres, installation du tout-à-l’égout…), traitement et contrôle des eaux (station d’épuration, filtres …), précautions alimentaires (la pasteurisation de certains aliments, les conseils sur leur cuisson et leur conservation permettent de diminuer considérablement les intoxications mortelles). Autre préconisation : la propreté des corps. On incite au lavage des mains et à la toilette quotidienne. En vogue jusqu’à la Renaissance, les bains publics ont été fermés. On pensait alors que l’eau amollissait la peau et ouvrait les pores aux infections qui pouvaient d’autant plus facilement entrer. Ils reviendront à la mode au XIXème siècle, provoquant l’affluence autour de certaines sources thermales. Le savon devient un instrument indispensable. Les maîtres mots sont bientôt : nettoyage, désinfection, stérilisation. L’ère hygiéniste a commencé et avec elle la prévention tout azimut.
La prévention : de l’incontournable…
Désignant à l’origine les préoccupations de santé publique, la prévention s’est très vite étendue à tout ce qui pouvait nuire tant aux individus qu’à la collectivité. On en parle à propos des accidents de la route, mais aussi en matière de conduites à risque (tabac, alcool, drogues illicites …), de mortalité infantile (la mort subite du nourrisson a régressé, passant de 102,8/100 000 en 1980 à 31,9/100 000 naissances vivantes en 2005), de maltraitance, du suicide, de délinquance, des accidents de travail, sans oublier les conflits armés, la violence ou encore les accidents majeurs etc…L’idée de peser sur les raisons de l’apparition d’un dysfonctionnement plutôt que d’attendre qu’il se manifeste pour intervenir peut sembler évidente. Elle est même très ancienne : « Esculape, dieu mythologique grec de la médecine avait deux filles : Panacée, déesse de la médecine et Higie, déesse de l’hygiène. Hippocrate disait déjà : « le meilleur médecin est celui qui peut prévoir et prévenir » (3). 2 500 ans après, on ne peut que constater la disproportion entre la médecine curative et la médecine préventive. En 2002, la prévention représente 2,3% des dépenses courantes en matière de santé. Si on y inclut les actes posés dans leur quotidien par les professionnels, on arrive à un résultat qui ne dépasse pas 7% (4). Quel que soit le domaine considéré, le budget consacré pour prévenir la survenue d’un dommage est infiniment moindre que celui investi pour y remédier. Bien des raisons peuvent être évoquées pour expliquer une telle attitude.
… au parent pauvre
La première concerne chacun(e) d’entre nous qui est naturellement et spontanément bien plus préoccupé(e) et motivé(e) par ce qui arrive plutôt que par ce qui pourrait arriver. Cela tient pour beaucoup à la visibilité de ce qui se produit qui prend une place dans les consciences que n’occupe pas ce qui reste au stade de la seule crainte ou de l’hypothèse. « Les hommes qui sont toujours si désireux de guérir d’une maladie déclarée s’inquiètent peu d’entretenir leur santé tant qu’ils se croient bien portants ; ils n’apprécient la santé que lorsqu’ils l’ont perdue. » (3) Mais cela va bien au-delà des seules questions sanitaires. Ainsi, de l’étude menée en 1995 par deux économistes sur la lutte contre la toxicomanie en France, et qui fait état du rapport entre le coût de la répression et celui du sanitaire (4,72 milliards contre 629,10 millions de Francs, soit une proportion de 1 à 7,5) (5). Pour ce qui est de la prévention de la délinquance la situation n’est pas meilleure. La construction des nouvelles prisons pour mineurs aura coûté 225.000 € pour chacune des 60 places prévues. Ce qui représente 8 ans du budget permettant d’intervenir en milieu ouvert auprès de 1.200 jeunes dans leur famille ! Des chiffres établis par une commission sénatoriale en 1998 faisaient état de 4.000 mesures de suivis éducatifs en souffrance par manque de professionnels. Quant à la prévention de l’alcoolisme, « Malgré une volonté affichée de faire de la lutte contre les méfaits de l’alcool une priorité de santé publique, le manque de moyens reste patent pour la prévention comme pour la prise en charge. » (6).
La peur et la culpabilité comme argument
Il est difficile d’établir un rapport certain de cause à effet. Tout juste peut-on constater une corrélation. D’un côté, on ne peut que remarquer, comme nous venons de le voir, la faiblesse de la démarche de prévention, la pauvreté de la culture qui incite à anticiper, la difficulté générale à devancer les effets négatifs. De l’autre, on assiste un tournant, à compter de 1999, dans la communication préventive qui se met à privilégier la peur et l’émotion. La carence d’attention et d’intérêt dont elle souffre serait-elle compensée par la violence des messages qu’elle utilise ? On ne compte plus ces affiches ou ces spots spectaculaires, allant parfois jusqu’à un effet littéralement « gore » qui ont pour ambition de frapper l’imagination et de détourner le public de comportements à risque. Vous fumez ? On vous propose, en gros plan, la photo d’un cancer de la gorge ou d’un poumon en train de se nécroser. Vous buvez un peu trop d’alcool ? On vous montre un clip qui mettant en scène un jeune homme en train de vomir. Mais le meilleur nous est encore réservé par les multiples versions gracieusement offertes par la prévention routière. Une affiche présente un enfant dans les bras de sa maman. Commentaire : « elle en voulait trois, il sera orphelin ». Une autre présente deux femmes côte à côte, heureuses, épanouies, en train de rire : « 25 ans d’amitié, elle la tuera ce soir ». Un autre enfant blond assis dans son lit vu de dos essayant de feuilleter un de ces livres ouverts en plâtre que l’on dispose sur une tombe. Une inscription : « à mon papa ». Et le commentaire : « Etre à l’heure pour dire bonsoir justifie-t-il un excès de vitesse ».
L’émotion contribue-t-elle au changement ?
Il n’est pas question ici de stigmatiser la bonne volonté des responsables et concepteurs de ces messages dont l’intention est de lutter contre des fléaux sanitaires responsables de 100.000 morts par an ou contre une violence routière qui est restée longtemps banalisée. Les efforts conjugués par les pouvoirs publics et les associations ont parfois porté leurs fruits, comme dans le cas de la prévention routière. Et cela est très bien. Même si on ne sait pas ce qui dans la prise de conscience de nos concitoyens a le plus pesé : la répression ou la prévention. Ce dont il s’agit, c’est bien de mesurer l’impact des messages qui confrontent les destinataires à des contenus forts et même sanglants se voulant déstabilisant et qui cherche à provoquer chez eux un réflexe de peur. Cette réaction joue un rôle essentiel chez l’être humain, comme dans le reste du monde animal. Elle permet de prendre en compte tout danger potentiellement menaçant. Sans elle, l’existence serait menacée, car le risque ne serait pas pris en compte. « La peur serait un facteur indispensable à la survie car sans elle, une indifférence totale s’installe face à la mort » explique Robert Dantzer (7), docteur vétérinaire. Face à une information représentant un danger, l’individu va tenter d’abord d’y répondre en résolvant le problème. En agissant ainsi, il cherche à diminuer le sentiment de peur. Plus la menace est intense, plus il va donc répondre pour diminuer l’impact émotionnel. Une telle réaction tend à justifier la pertinence des campagnes à fort impact émotionnel.
Ou peut-elle être sans effet?
Pourtant, les chercheurs en psychologie sociale, qui ont mené des travaux depuis les années 70 sur « l’appel à la peur » dans la gestion des risques, ne sont pas d’accord entre eux. L’un d’entre eux, Léon Festinger, a tenté de démontrer que le récepteur de ces messages est un fin stratège qui sait mettre en œuvre des mécanismes de régulation de la menace. Et pas forcément en s’y soumettant. S’il peut adopter une stratégie d’action qui respecte les recommandations préconisées, il peut, tout autant, les mettre en échec, par dénigrement, reniement ou rejet des informations, atténuation, mise en doute de la crédibilité, sous-estimation. Il peut aussi approuver ce qui est transmis, mais en ne se considérant toutefois pas personnellement concerné, étant persuadé que cela concerne les autres : lui est un « bon » conducteur, un « fumeur » ou un consommateur d’alcool éclairé, pas un chauffard ou un drogué. L’une et l’autre de ces attitudes répondent, chacune à sa manière, au bouleversement de ses croyances internes ainsi qu’à la dissonance cognitive provoquée. L’utilisation de la peur peut donc tout autant s’avérer efficace que contre-productive. Le fonctionnement humain s’avère bien plus complexe que le laisse penser les théories comportementalistes. Pour ces dernières, il suffirait de renforcer un comportement par un stimulus positif ou le décourager par un stimulus négatif pour réussir à l’amplifier ou le réduire. Si face à l’enfant, nous utilisons en permanence et sans forcément le savoir des réflexes de conditionnement, c’est bien loin d’être suffisant en éducation.
La prévention comme réponse multiple
Bien d’autres ressorts peuvent être utilisés. Si les risques y compris graves ne doivent pas être mésestimés, il doit y avoir aussi de la place pour l’information objective, pour l’humour, ou pour le conseil bienveillant. Et puis, il y a la compréhension de ce qui pousse à agir. Aussi absurde que son comportement puisse nous paraître, chacun a d’excellentes raisons d’agir comme il le fait. Nous ne les connaissons pas forcément. Nous ne les comprenons pas toujours. Elles peuvent parfois nous sembler futiles, ridicules ou inacceptables. Elles peuvent même être illégales et mener devant les tribunaux. Il reste néanmoins important de se mettre en situation d’appréhender comment cela fonctionne dans la tête de l’autre, non dans une logique de stigmatisation, mais comme condition pour essayer de transmettre un message. Enfin, on peut tenir tous les discours de prévention que l’on veut aux enfants ou aux adolescents. Ils vont l’entendre, s’en approprier tout ou partie ou bien le rejeter. Le sort qu’ils réserveront à nos propos dépendra de plusieurs choses. De l’estime qu’ils nous portent, de l’articulation avec leur logique interne. Mais ce qu’ils vont aussi vérifier, c’est bien notre capacité à mettre en cohérence nos attitudes et nos propos : « On n'enseigne pas ce que l'on veut ; je dirais même que l'on n'enseigne pas ce que l'on sait ou ce que l'on croit savoir : on n'enseigne et on ne peut enseigner que ce que l'on est. » affirmait Jean Jaurès.
(1) « Une soupe aux herbes sauvages » Emilie Carles, Livre de poche, 1997
(2) in « Médecine et Hygiène », juillet 2004
(3) « Sciences humaines et sociales, l'homme, la société et la médecine » Guy Lazorthes, Masson, 2000
(4) « Les dépenses de prévention dans les comptes nationaux de la santé. Etude exploratoire » Etudes et résultats n°247, juillet 2003
(5) Rapport Pierre Kopp et Christophe Palle, voir Le Monde du 10 mars 1997
(6) Expertise collective Alcool Inserm, Effets sur la santé (2001), Dommages sociaux, abus et dépendances (2003).
(7) R. Dantzer « Agir ou se défendre » Science et vie, 1989, numéro spécial « Les émotions »
Définition de la prévention
L’Organisation mondiale de la santé a donné dès 1948 une définition de la prévention qui distingue trois stades successifs. La prévention primaire consiste à lutter contre des risques avant l'apparition de tout problème. Elle s’adresse à l’ensemble de la population. La prévention secondaire cherche à dépister le début d’une maladie ou d’un dysfonctionnement, afin d’y répondre au plus vite. Elle s’intéresse aux populations à risque potentiel. Enfin, la prévention tertiaire concerne la détection d’éventuelles récidives au sein de population ayant déjà eu à souffrir d’affections. Elle répond plus particulièrement aux populations menacées de rechutes ou de complications.
Prévention et gros sous
L’Etat engrange chaque année des taxes tant sur l’alcool (4,9 Milliards en 2000) que sur le tabac (11,8 milliards en 2006). Peut-on y voir le retard pris dans les campagnes de prévention ? S’il est facile de déterminer le montant de ces précieuses ressources, il n’en va pas de même du coût sanitaire, social, économique difficilement plus identifiable. L’économiste Pierre Kopp évalue le coût du tabac (66.000 morts par an) à 10 milliards d’euros : dépenses de santé, pertes de revenus et de production etc … Pour ce qui est du coût de l’alcool (45.000 morts par an), il est évalué à 28,7 Milliards d'Euros (hors coût professionnel et celui dus aux accidents de la route). Quant à la prévention des maladies, elle se heurte à une réalité tout aussi triviale : les bénéfices des compagnies pharmaceutiques sont conditionnés au fait que la population prenne des traitements permanents, pour traiter des maladies incurables. Entre 1991 et 2000, les bénéfices de neuf firmes majeures nord américaines se sont accrus de 182 %, la actionnaires recevant 88 milliard de$ de dividendes. Difficile d’entrevoir sereinement un programme de prévention qui réduirait autant les risques... que les bénéfices !
Pourquoi la prévention n’est pas toujours aussi efficace qu’on le souhaite ?
Les comportements humains ne peuvent être réduits au seul calcul rationnel qui amènerait chacun à peser le pour et le contre, à évaluer objectivement le coût estimé et le gain attendu, à mesurer le bénéfice et les désavantages. Si un tel mécanisme intellectuel existe bel et bien, il est loin de recouvrir la totalité des motivations qui nous poussent à agir. La difficulté de se projeter dans le temps ou de mesurer les conséquences de nos actes, le choix de privilégier un plaisir immédiat au détriment d’un intérêt à plus long terme, une dépendance physiologique, le plaisir trouvé dans l’attitude proscrite, l’attrait pour l’interdit, le non-conformisme, le sentiment de perdre son libre-arbitre, etc … sont autant de raisons qui peuvent nous guider et prendre la place de l’attitude pourtant la plus raisonnable.
Fiche n°1 : Diabolisation à travers le temps
L’utilisation de la peur pour tenter de prévenir des soucis de santé n’est pas récente. Les exemples passés peuvent nous aider à relativiser nos propres tentatives contemporaines
1. « Elle est un de ces fléaux qui attaquent et détruisent sourdement l’humanité. A mon avis, ni la peste, ni la guerre, ni la variole, ni une foule de maux semblables, n’ont de résultats plus désastreux pour l’humanité que cette fatale habitude. C’est l’élément destructeur des sociétés civilisées, et d’autant plus actif qu’il agit continuellement et mine peu à peu les générations… »
2. « Elle est dangereuse, physiquement et moralement pour la femme. Les tissus sensibles sont soumis à une pression dont les effets néfastes ne peuvent encore être évalués. »
3. « C’est une peste, un mal, un violent destructeur de biens, de terres, de santé; infernal, démoniaque, maudit, c’est la ruine et la défaite du corps et de l’âme. »
4. « Il corrompt les hommes, il abaisse le civisme et menace les libertés et les institutions de la Nation. Il mine et affaiblit le foyer et la famille, met en échec l’éducation, il s’attaque à une jeunesse qui a le droit d’être protégée. Il porte des coups mortels à la survie de la Nation, voire de la race. »
5. « Il détruit les familles, gâte, corrompt et anéantit les hommes; le tonnerre, l’éclair, la guerre, le feu, la peste ont moins nui que cette brûlante concupiscence, que cette passion brutale. »
6. « Il nous faut l’éviter avec soin, lui qui pourrait nous inoculer un tel venin, et le fuir d’homme à homme, de maison à maison, de village à village, de ville en ville. »
Réponses :
1. La masturbation, Traité d’hygiène et de physiologie du mariage, 1828
2. La selle de vélo, Provincial medical journal, 1895
3. Le tabac, Burton, 1932
4. L'alcool, Hobson, 1914
5. L'instinct sexuel, Burton, 1932
6. L'air (1348)
Quelques devinettes destinées à stimuler les cellules grises des participants à la journée 'Peur et prévention'.(Education Santé, n° 177, mars 2003)
Fiche n°2 : On n’est pas obligé de faire peur pour être efficace
Un spot de la prévention anglaise fait exception au choix du « gore ». Il met en scène une magnifique moto rouge Ducati 999 qui sillonne la campagne. Sa route est bordée de panneaux ou d’annonces qui lui indiquent les dangers qu’il va rencontrer. Un panneau routier l’avertit « essence renversée ». Un autre : « bouses fraîches à 100 mètres ». Trois se succèdent dans un virage : « doucement » dit le premier, « oh, mon garçon » continue le second, « c’est plus serré que tu ne le penses » confirme le dernier. A l’arrière d’un car, marqué à la craie : « je m’apprête à tourner à droite ». « Camion en approche » précise encore un panneau, au moment ou le motard s’apprête à doubler. Un stoppeur tient un bloc indiquant sa destination. Il tourne la page au moment où passe la moto : « attention au tracteur » indique la feuille qu’il montre. Effectivement un agriculteur sort brusquement de son champ avec son engin. Arrivé à destination après avoir échappé à tous les dangers, le motard s’arrête et enlève son casque. Il n’échappera pas à une fiente d’oiseaux qui s’étale complaisamment sur l’épaule gauche de sa combinaison en cuir. Le spot se termine par un slogan « Si seulement, on y pensait ». Humour, bienveillance et sages conseils sont privilégiés dans ce message de prévention, démontrant que d’autres ressorts sont possibles.
Visible sur : http://moto.cled17.com/prevention-routiere-anglaise-avec-une-ducati-999
Bibliographie
« La prévention : concept, politiques, pratiques en débat » Sous la direction de Brigitte BOUQUET, l’Harmattan, 2005, 181 p.A l’origine des premières politiques préventives, on trouve la conviction selon laquelle la mortalité infantile privant la nation de soldats potentiels, il fallait tout mettre en œuvre pour leur permettre de parvenir à l’âge adulte ! La loi de 1902 fixera à l’Etat la prérogative de lutter contre les grands fléaux (tuberculose, syphilis, alcoolisme …), considérant que la santé du corps social comme celle du corps humain dépendait de la seule hygiène. Aujourd’hui, la prévention dérive de plus en plus vers le principe de précaution. Alors que celui-ci devrait se limiter à évaluer le risque et le réduire à un niveau acceptable, il est fréquemment identifié au risque zéro. Ce qui ne manque pas de constituer pour l’action sociale, qui agit en permanence sur l’incertitude et l’imprévisibilité, un frein et un blocage en matière d’initiative et de créativité. Deux modèles se sont toujours opposés. Le premier, celui du régime de responsabilité, considère que la sécurité n’est pas un droit, mais un devoir. Il revient à chacun de se prémunir, en prenant tous les moyens pour anticiper. L’autre modèle basé sur la solidarité considère que le risque est inhérent au fonctionnement tant de l’individu que du corps social. Il le socialise, en prenant en compte les déterminants économiques, sociaux, culturels et symboliques. On identifie bien ici les tenants et aboutissants libéraux du premier et ceux basés sur les larges implications sociétales pour le second.
« Peur et prévention » Bruxelles santé numéro spécial 2003
Quid de l’usage de la peur dans les messages de prévention ? Est-ce efficace ? Y a-t-il des effets contre-productifs ? N’y a-t-il pas là des risques de jouer aux apprentis sorciers ? L’utilisation de la peur (de l’avenir, du changement, de l’autre …) n’est-elle à double tranchant. Jouer avec le sentiment d’insécurité n’est-il pas lourd de menaces, ne serait-ce qu’au travers du mythe du risque zéro ? Actes d’un colloque tenu en décembre 2002, la revue bruxelloise pose ici des questions intelligentes et apporte des réponses qui ne le sont pas moins. Elle donne la parole à une historienne, un médecin, un journaliste et à un philosophe. L’historienne rappelle les peurs du passé face à la maladie et à la mort en les comparant avec celles qui peuvent nous émouvoir aujourd’hui. Le médecin évoque les recherches scientifiques qui ont essayé d’établir l’(iné)efficacité de l’utilisation de la peur dans les campagnes de prévention. Le journaliste parle de la place des média dans ces campagnes, d’influence du marketing et de la priorité donnée au vécu et à l’émotion. Le philosophe, enfin rapporte l’éclairage auquel ses pairs ont pu contribuer aux différentes époques. Une lecture savante autant que passionnante sur une question qui justifie pleinement qu’on l’interroge.
Téléchargeable gratuitement sur le site http://www.questionsante.org
« Prévention et précaution » Philippe Arbouch, Philippe Askenazy , Harrie Bijen, Boutrin éditeur, 2007
Le principe de " précaution " est maintenant inscrit dans la Constitution française.
Un acquis indéniable pour certains, problématique pour d'autres. En tous les cas, une prise de conscience face aux redoutables enjeux du XXIe siècle, et qui ne doit pas en rester au stade du pieux discours sans conséquence. Venus de tous horizons - médecine, recherche scientifique, économie, droit, sociologie, philosophie, urbanisme, politique ou syndicalisme - des spécialistes de réputation internationale répondent clairement à des questions cruciales : comment notre société doit-elle apprendre à mieux maîtriser toutes sortes de risques ? Comment faut-il intégrer dans notre vie quotidienne la notion de développement durable ? Comment concilier à l'ère de la compétition mondiale prévention et précaution ?
« Evaluation en milieu scolaire d’un programme de prévention primaire en matière de toxicomanie » Par Marie CHOQUET et Christophe LAGADIC, Observatoire Français des Drogues et des Toxicomanies, 1999
Les deux chercheurs ont mis en place une étude quasi expérimentale qui a permis de comparer des adolescents de deux villes (comparables sur le plan sociodémographique) dont une a bénéficié d’une action de prévention expérimentale, l’autre non. La ville de Saint-Herblain mène depuis 1992, au niveau de tous les collèges (publics et privés), un programme de prévention primaire globale et continue destiné aux élèves des classes de 6ème, de 4ème, de 3ème. Son contenu est adapté à l’âge du sujet, implique la participation des parents et est aisément transférable, car il nécessite de faibles moyens financiers. De cette étude, il ressort que les filles se disent globalement plus intéressées que les garçons, que toutes les actions ont apporté des connaissances et des éléments de réflexion à au moins un jeune sur deux (les actions semblent plus bénéfiques aux filles qu’aux garçons), enfin l’utilité des actions n’est reconnue que par une minorité et cette proportion diminue en fonction de l’ancienneté de l’action. Toutes les données suggèrent que les filles, plus intéressées et plus concernées par les actions de prévention que les garçons, sont aussi plus enclines qu’eux à modifier leurs comportements. Il convient donc de mieux comprendre pourquoi ces différences entre les sexes existent (inadéquation des messages pour les garçons, prédominance des femmes dans les champs de la prévention...) et comment on peut y remédier.
Téléchargeable sur http://www.drogues.gouv.fr/article1011.html
A lire l’interview avec Trefois Patrick - Prévention
Jacques Trémintin - Journal de L’Animation ■ n°89 ■ mai 2008