L’enfant mis à nu. L’allégation d’abus sexuel. La recherche de la vérité
Sous la direction d’Hubert Van Gijseghem, Méridien, 1995, 296 p.
Les éditions Méridien ont édité en 1995 un ouvrage regroupant sous la direction d’Hubert Van Gisjeghem un certain nombre de contributions sur le thème des allégations d’abus sexuels (1). On retrouve dans cet ouvrage l’essentiel de la démonstration que l’auteur propose dans ses conférences.
Le témoignage de l’enfant y est abordé dans ses aspects affectifs: besoin de plaire, stratégies de survie mises en place pour supporter l’insupportable (tels le déni dans la fantaisie, l’inhibition de la pensée spontanée ou l’anticipation des malheurs futurs).
Mais, il y a aussi toute la dimension cognitive. La mémoire se modifie avec le temps. Ce, d’autant plus avec le petit d’homme qui ne perçoit pas les événements dans leur chronologie comme peut le faire l’adulte. Se pose alors la question de la mémoire épisodique ( qui fixe un événement précis) bien moins performante que la mémoire de scénario (fusion de plusieurs situations répétées qui sont alors entremêlées et amalgamées). Ce processus en oeuvre, quel que soit l’âge, ne remet pas en cause la réalité du vécu mais rend difficile l’isolation de la spécificité de chaque événement pris à part.
Une foule de facteurs intervient donc pour troubler la clarté, la précision, la cohérence et la consistance du témoignage de l’enfant sans que cela soit suffisant pour en remettre en cause la validité. Car, on a trop tendance à lui appliquer la même logique que celle imposée à l’adulte. « Les réflexions sur le serment », autre contribution présentée dans cet ouvrage, sont à cet effet, passionnantes. On y suit l’histoire et l’itinéraire du mensonge. Depuis la croyance et l’esprit magique à partir desquels l’enfant décrypte la réalité en étant persuadé de dire vrai, jusqu’au mensonge proprement dit comme intentionnalité d’altération des faits, l’apprentissage du respect de la vérité est une longue conquête. Car il y a aussi le mensonge-désir, le mensonge-altruiste ou celui utilitaire. Avant huit ans, c’est la crainte de la punition qui fait réagir l’enfant. Après cet âge, il cherchera surtout à préserver la confiance et l’affection réciproques.
L’étude des modalités de l’entrevue avec l’enfant fait aussi l’objet d’une présentation pertinente et constructive. L’amélioration des conditions de l’audition apparaît d’autant indispensables que les professionnels ne sont guère préparés ni formés à cette tâche.
La seconde partie de l’ouvrage est consacrée au contexte de la fausse allégation tant dans ce qui peut l’expliquer chez le jeune (besoin de se protéger et/ou de préserver son désir et ses fantaisies) que chez ceux qui lui font écho. Car, s’il n’est pas question de perdre de vue, une seule seconde, que l’immense majorité des révélations correspond à la réalité, il est tout aussi important de prendre conscience des mécanismes des dérapages potentiels.
Enfin, dernier chapitre de l’ouvrage, celui s’intéressant à l’aspect juridique et plus particulièrement québécois de la réponse donnée aux témoignages d’enfants abusés.
(1) Distribué en France par le Journal du Droit des Jeunes (Tél.: 05-90-77-07 / appel gratuit)
Jacques Trémintin – Octobre 1995 – Non paru