Sociologie des élites délinquantes. De la criminalité en col blanc à la corruption politique
LASCOUMES Pierre et NAGELS Carla, Ed. Armand Colin, 2014, 303 p.
La criminologie s'est toujours focalisée sur les transgressions des classes les plus défavorisées, celles des élites étant l'objet de recherches très marginales. D'abord, parce qu'elles bénéficient d'un prestige qui contribue à banaliser leurs illégalismes. Ensuite, parce que leur pouvoir exercent une crainte révérencielle. Enfin, parce que leur statut, leurs multiples ressources et leurs réseaux leur permettent de réduire considérablement la visibilité de leurs comportements illicites. Pourtant, les actes illégaux commis sont nombreux et multiples : escroqueries individuelles, faillites frauduleuses, non respect des règles de sécurité et d'hygiène au travail, tromperie sur la qualité des produits, fraudes fiscales, fausses déclarations en douane, non respect des normes environnementales etc... La justice pénale est totalement dépendante des régularisations administrative et civile en matière économique et financière. La dépénalisation en cours de la vie des affaires renforce le sentiment des classes dirigeantes d'être au-dessus de la loi commune. Si la probité publique et l'honnêteté sont des valeurs essentielles garantissant l'égalité de traitement de tous les citoyens, l'action publique est frappée au coin de la plus grande des timidités quand il s'agit de s'attaquer à la corruption et à la criminalité financière. Ainsi, la délinquance astucieuse représente-t-elle 10 % des condamnations pénales et la délinquance économique … 4 %. Longue est la liste des scandales ayant fait l'objet d'enquêtes n'aboutissant à aucune condamnation ou à une peine symbolique. Mais, la criminalité en col blanc ne peut être analysée en dehors du façonnage éthique des individus, de leur rationalité et de leur point de vue déontologique fondés par les seules compétition et recherche effrénée du profit maximum.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°1193 ■ 13/10/2016