Handicap et sexualité: Entre interdit et accompagnement - VIH, Stérilisation… L’éthique en pratique

Cahiers de l’Actif n°268/269 (sept/oct. 1998)  - n°270/271 (nove/déc. 1998) - Cahiers de l’Actif (259, avenue de Malgueil BP 33  - 34280 La Grande Motte).

Masturbation en public à la fin du repas, maquillage outrancier ou tenue extravagante pour celle qui cherche à afficher sa féminité, comportements homosexuels tolérés comme exutoire aux pulsions, demande d’achat de cassettes pornographiques … il ne faut pas nous le cacher, la sexualité des adultes handicapés reste encore pour l’essentiel un tabou qu’on sait gèrer plus ou moins bien. C’est que parents et professionnels oscillent encore entre le déni de la sexualité des personnes handicapées ou son identification à une forme de bestialité. Tout commence par la découverte par l’enfant handicapé de ses organes génitaux, ce qui est plus ou moins bien accepté. « Le travail consiste à canaliser et organiser les mouvements pulsionnels et à permettre une expression la plus autonome possible (y compris avec des limites sociales que cela implique). » Aborder cette sexualité ne signifie pas se limiter à la seule génitalité, mais aussi traiter de l’amour du beau, de la tendresse, de l’amitié, du plaisir d’être ensemble, côte à côte, des manifestations gestuelles, des baisers des caresses, des enlacements et du désir d’enfant. Cette approche provoque chez les jeunes handicapés les mêmes réactions que chez les autres jeunes : fausse indifférence, pudeur, rejet, gêne, fou rire, mais aussi écoute attentive. L’ironie, la moquerie, la dévalorisation, le viol de l’intimité constituent des atteintes graves à la dignité humaine. Oublier que la sexualité fait partie intégrante de l’éducation qui doit être apportée à tout personne relève d’une forme de mutilation. « L’accès à la sexualité est un droit universel et même si l’handicapé ne peut défendre ce droit, nous nous devons de faire pour lui comme nous le faisons pour toutes les autres dimensions de sa vie » affirme avec raison Réjean Tremblay. Mais il arrive encore que les parents s’oppose à une telle éducation en menaçant de porter plainte pour « incitation à la débauche », un peu comme si en refusant d’admettre la sexualité de leur enfant, ils se mettaient à l’abri de l’avenir. C’est aussi cette crainte qui pousse nombre de familles et de professionnels à accepter le principe de la stérilisation. L’éthique commande au contraire le respect de la dignité de la personne et l’application de cette intervention qu’aux conditions exceptionnelles définies par le Comité National d’Ehique en avril 1996 : la personne doit être fertile, sexuellement active, être âgée d’au moins 20 ans et sévèrement déficiente, aucune autre méthode contraceptive ne doit pouvoir être utilisée et une commission indépendante de la famille ou du tuteur doit donner son avis. Conditions qui limitent drastiquement la possibilité de stérilisation.

 

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°494 ■ 08/07/1999