A quoi sert l’autorité? S’affirmer - respecter - coopérer
Véronique Guérin, Chronique Sociale, 2001, 224 p.
Le concept d’autorité ne va plus de soi. Pendant longtemps, les manuels d’éducation pratique se sont centrés sur les sanctions et leur efficacité à faire obéir l’enfant. Plus proche du dressage des animaux dont on attend qu’ils se soumettent à leur maître, cet autoritarisme a surtout abouti au conformisme, au ressentiment et au désir de vengeance quand ce n’était pas à de la violence sournoise. En réaction, s’est développée une permissivité qui, si elle a élargi le champ d’exploration de l’enfant et développé ses capacités de prise d’initiative, l’a aussi transformé en enfant roi, en difficulté pour gérer ses frustrations, et prendre en compte l’autre. Ce que propose l’auteur, c’est bien de sortir de cette alternative en développant le modèle de l’autorité éducative qui vise à former des citoyens aptes à comprendre comment eux-mêmes et les autres fonctionnent et à agir en être libre et responsable. Pour satisfaire de tels desseins, trois axes sont proposés. On doit commencer par apprendre à se connaître. C’est par exemple, identifier ses perceptions, en sachant prendre de la distance par rapport aux mécanismes de généralisation, de sélection et de distorsion de l’information. C’est aussi savoir reconnaître son état intérieur : souvent, face à l’enfant on ne sait que le juger ou minimiser ses actes ou encore lui apporter des solutions. Il est bien plus difficile et pourtant combien plus utile d’écouter ses émotions et de l’aider à les nommer (ce qui ne signifie pas les approuver ou les encourager). Deuxième axe sur lequel travailler : apprendre à respecter autrui. « Fixer des limites à l’enfant, tout en préservant sa vitalité » (p.104) n’est pas si simple. Se joue alors la responsabilité de l’adulte qui se doit de proposer un cadre adapté, de fixer des règles qui soient explicites et hiérarchisées. Il doit aussi les faire respecter en appliquant au besoin des sanctions qui visent non le transgresseur mais l’acte commis. Enfin, troisième axe : apprendre à coopérer. Il est plus fréquent de valoriser la compétition et l’excellence individuelle. Pour autant, tout un champ s’ouvre à l’éducateur pour inciter et favoriser cette coopération, que ce soit dans la gestion des conflits (la médiation propose alors une solution gagnant/gagnant), dans les jeux (certains d’entre eux se basent sur la capacité à s’entraider), dans l’apprentissage (pédagogie de l’échange des savoirs) ou la prise de décision. L’ensemble de ces démarches nécessite de rester ouvert au point de vue de l’enfant tout en étant garant de la sécurité et la continuité gages de sa bonne évolution, de lui fournir un environnement adapté à ses besoins, tout en lui permettant de gagner la confiance en soi, enfin de l’aider à canaliser les émotions intérieures susceptibles de le submerger tout en n’hésitant pas à le contenir physiquement si nécessaire.
Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°616 ■ 04/04/2002