Origines, identités, destinées: que dire à un enfant qui s’inquiète de son origine

Sous la direction de Michel Soulé, ESF, 1996, 153 p.

Depuis 23 ans, le Centre de Guidance Infantile de l’Institut de Puériculture de Paris tient tous les ans une journée scientifique. L’année1995 fut l’occasion de s’intéresser à la brûlante question des origines. Douze interventions marquèrent ce colloque, douze propos que nous rapportent ici les éditions ESF. De quoi trouver pour chacun midi à sa porte.
Quelques psychanalystes pur jus nous livrent des réflexions dont le caractère obscur n’a d’égal que la logique confidentielle dont ils semblent avoir du mal à se détacher. Ils sont rejoints en cela par un linguiste aux échos des plus ennuyeux. Quant au maître d’oeuvre lui-même, Michel Soulé, son intervention est si embrouillée qu’il s’est emmêlé dans ses feuilles par trois fois. Le laudateur, chargé de commenter chaque intervention, note après l’une d’entre elles la qualité du silence du public, en supposant l’émerveillement des auditeurs, sans imaginer un seul instant ... la qualité de leur somnolence.
Mais, et c’est là le propre de ce type de recueil, on y trouve aussi des contributions fort intéressantes. Il en va ainsi de celle de François Forestier qui nous livre une synthèse passionnante sur l’origine de la vie et de l’homme. Il en va de même pour Colette Chiland qui planche sur l’origine du sexe au travers tant des facteurs biologiques que psychologiques et mythologiques. A noter aussi la communication de Jean-Claude Arfouilloux, consacrée à l’origine de la psychothérapie. Ce médecin-psychiatre du Placement Familial Spécialisé rappelle la longue tradition historique de l’action exercée sur le psychisme en appui à l’action instrumentale et médicamenteuse. Lui, le psychanalyste défend l’idée de la mise en oeuvre des mêmes mécanismes dans toute psychothérapie qu’elle soit d’origine freudienne ou non. Seuls le traitement et l’aménagement du cadre, explique-t-il, sont marqués par les particularités de chaque école. Pour ce qui le concerne, il insiste sur l’autonomie du processus déclenché par la cure, l’analysant pouvant simplement surveiller les étapes sans avoir le pouvoir de l’infléchir à sa volonté. Enfin, il place la séparation entre le patient et son thérapeute au coeur de la relation et ce dès son origine. S’ensuit tout un développement sur la rupture, la discontinuité et le mécanisme du deuil.
On ne refermera pas ce livre sans lire l’intervention de Marcel Ruffo consacrée à la tolérance. S’y trouve développé l’épisode de l’immigration italienne à Marseille à la fin du XIXème siècle et au début du XXème. Cette description nous apparaît rétrospectivement avec des relents malheureusement bien contemporains, preuve s’il en est que la bêtise xénophobe peut fort bien traverser les siècles, elle ne fait preuve ni de beaucoup d’imagination, ni de grande capacité de renouvellement. Malgré le changement des populations-cibles (hier les italiens, aujourd’hui les maghrébins), les vieux réflexes d’exclusion gardent tout leur côté inepte et ignoble.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°371 ■ 31/10/1996