Les travailleurs sociaux et le droit pénal

Valérie SCHMIDT-KERHOAS, L’Harmattan, 1998, 332 p.

Issu d’une thèse de doctorat en droit, ce livre passionnant et d’une lecture facile, passe en revue toutes les entrées par lesquelles les travailleurs sociaux sont en relation avec le droit pénal. Pendant longtemps, il y a eu opposition entre ce qui relevait d’une logique de perfectibilité humaine et sociale et ce qui se centrait sur la répression des infractions, délits et crimes. Le travail social, convoqué sur la scène de l’exclusion massive, a du sortir de la seule relation interindividuelle pour entrer dans une relation de réseau. Quant au système judiciaire pénal, fondé traditionnellement sur le triptyque intimidation (aspect dissuasif de la peine), rétribution (proportionnalité de la sanction en fonction de la transgression) et réadaptation (réinsertion du délinquant), il s’est de plus en plus investi dans le troisième axe. D’où la place grandissante des professionnels de l’action sociale tout au long du processus pénal. Cela a commencé par la création, au lendemain de la guerre, de ces grandes institutions, incontournables auxiliaires de la justice. C’est d’abord cette Education Surveillée devenue depuis Protection Judiciaire de la Jeunesse qui prend en charge les jeunes délinquants et les mineurs en situation de danger. Largement influencé par la législation des mineurs, s’est construit à la même époque le service socio-éducatif de l’administration pénitentiaire, qui s’est progressivement scindé en deux (un service intervenant en milieu fermé et un autre -Comité de Probation et d’Aide aux Libérés- qui intervenait à l’issue de l’incarcération) et qui vient de se réunifier en 1999 au sein du SPIP (Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation). Mais, les travailleurs sociaux ont aussi pris toute leur place au cœur de toute une série de procédures qui ont émergé ces vingt dernières années : mission de réparation tant par rapport aux victimes que par rapport aux délinquants (médiation pénale), dans les enquêtes rapides qui permettent de faire valoir les traits de personnalité et de situation du délinquant qui justifient une alternative à l’incarcération (obligatoire pour les mineurs et jusqu’à 21 ans et pour les majeurs en matière criminelle), dans le contrôle et l’aide à l’insertion dans le cadre des sursis avec mise à l’épreuve, l’application des travaux d’intérêt général ou encore les régimes de semi-liberté ou de placement extérieur. Valérie Schmidt-Kerhoas consacre la seconde partie de son ouvrage à la question des travailleurs sociaux confrontés à la loi pénale, mais cette fois-ci en tant que justiciable : la responsabilité professionnelle (avec un très intéressant développement sur le secret professionnel), la position de victime d’infraction à la loi et celle de prévenu. Très didactique, cet ouvrage mérite d’être lu par des professionnels en général peu au fait en matière juridique, qui pourront en tirer grand bénéfice.

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°537 ■ 29/06/2000