Soins et prisons

CHASSAGNE Aline, Éd. érès, 2019, 292 p.

Il aura fallu attendre 1944, pour qu’un service médial et médico-psychologique devienne obligatoire dans tout établissement pénitentiaire. Et 1994, pour que les infirmiers supplantent les gardiens pour distribuer les médicaments et que les détenus soient rattachés au droit commun dans l’accès aux soins. Cette reconnaissance du médical n’a jamais réussi à rompre la dichotomie entre la perception du patient-détenu par des soignants qui sont là pour guérir et celle du détenu-patient par des surveillants dont la mission est de sécuriser. La demande de soins passe par un courrier dûment rempli que la personne incarcérée confie au gardien du temps qui détient le pouvoir d’accélérer ou de ralentir les délais de transmission. Le détenu ne choisit ni le jour, ni l’heure de la consultation, ni son médecin. Et c’est l’équipe médicale qui évalue les priorités et l’ordre de passage. Les personnes sous écrou présentent des caractéristiques sanitaires bien plus dégradées que le reste de la population. Ils sont deux fois plus malades et deux fois moins soignés. Au-delà de sa mission d’enfermement, la prison remplit la fonction d’un hôpital, d’un centre de lutte contre la toxicomanie et d’un lieu de fin de vie. L’auteur nous livre illustre sa monographie sur la place du médical au sein de la prison, en proposant un focus sur dix-sept détenus sur le point de mourir bénéficiant paradoxalement de plus d’interactions qu’à l’extérieur.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1318 ■ 24/05/2022