Comment être parent en prison ?

DOURIS Marie et ROMAN Pascal (sous la direction), Éd. érès, 2020

Les droits et obligations parentales ne s’arrêtent pas aux portes de la prison, même si l’incarcération rompt l’union familiale sans qu’il y ait une volonté de rupture de ses membres. Mais cette titularité est plus juridique que matérielle. Par défaut de moyens financiers permettant les déplacements jusqu’aux lieux de détention, parfois très éloignés géographiquement ; du fait d’une durée de la peine usant les liens ; à cause des modalités d’accueil des établissements pas toujours adaptées. Certes, l’administration pénitentiaire cherche à implanter des équipements. Soixante-douze nurseries sont réparties sur vingt-huit établissements pour accueillir les mères incarcérées qui peuvent garder leurs enfants auprès d’elles jusqu’à ses 18 mois. Paradoxe de l’impératif de cette proximité parent/enfant se heurtant à l’insupportable présence de ce dernier dans l’enfermement. Parmi les autres facteurs contribuant à déliter les relations familiales, il y a ces durées très courtes des parloirs et le nombre limitées de visites possible (même si le règlement l’autorise jusqu’à trois fois par semaine).  A cela se rajoutent parfois le refus de l’autre parent d’assurer de telles visites, mais aussi le choix du détenu de refuser d’imposer à son enfant une rencontre en un lieu où il estime qu’il n’a rien à y faire. L’incarcération joue, en outre, un rôle disqualifiant pour l’autorité de l’adulte qui se trouve délégitimée, quand elle ne se transforme pas au contraire en un contrôle excessif à distance, au nom de l’affirmation d’une masculinité disqualifiée. Le développement de salons parents/enfants, de parloirs familiaux, d’unités de vie familiale viendrait répondre aux attentes d’humanisation que vient contrarier une moindre considération de la fonction parentale face à celle de détenu.

 

Jacques TrémintinLIEN SOCIAL ■ n°1318 ■ 24/05/2022