Olivier VERMONT, Editions de l'Archipel, 1995, 269p.

Olivier Vermont a choisi de plonger dans le militantisme français et nous rapporte un reportage-témoignage vivant et drôle. Pas de parti-pris, mais une description minutieuse de la vie d'un adhérent de base.

Première démarche : adopter l'accoutrement et le pedigree adéquats à chaque formation. Au Front National, Olivier Vermont se présentera en bomber noir et comme chômeur. Au RPR, en veste passe-partout et comme jeune diplômé de science po. Au CDS, en boutons de manchette et comme employé dans une entreprise d'audit. Au PS, en vieux pull et jean et comme étudiant en science économique. Au PC, en baskets rouges et comme chômeur et étudiant malchanceux. Enfin, chez les Verts, en fripes recyclées dénichées aux puces et comme objecteur de conscience.

Deuxième étape : prendre contact avec les différents partis et partager l'action militante de chacun (en prenant bien soin d'éviter les regroupements en jonglant au besoin avec les horaires comme ce 1er mai partagé entre une vente de muguet pour le PC à 9h00 et la cérémonie du FN en l'honneur de Jeanne d'Arc à 10h30).

De cet itinéraire, que retirer comme impression ? Mesquineries et servilité l'emportent largement sur la générosité et les actes de courage. La lutte pour le pouvoir est commune à chaque formation, le militant de base servant de faire-valoir à des dirigeants bien plus préoccupés par leur carrière que de donner la parole a la base. Qu'on en juge plutôt...

Au RPR, Olivier Vermont fait la connaissance de Fabien, diplômé de l'ENA et de science po, intéressé par une seule chose : devenir député et avoir un poste proche du pouvoir. Ses diplômes, il les cache pour mieux passer incognito auprès de ses compagnons "discuter avec des minables, ça me fait de l'entraînement". Au PS, l'heure est plutôt à la débâcle... ambiance fin de règne ! Et puis la section du 2nd arrondissement hésite à prendre des nouvelles adhésions. La Fédération prélève en effet 500 Frs à chaque nouvel arrivant, avant même que les cotisations ne soient rentrées... alors ça coûte moins cher d'attendre ! Au FN, nervis et apprentis dictateurs se partagent le pouvoir. Opérations musclées, service d'ordre dissuasif, hommage rendu aux derniers nazis disparus... ça donne froid dans le dos. Au PC, on continue à communier autour de la lecture de l’Humanité véritable bible de la ligne du parti, chaque revirement faisant l'objet de multiples réajustements à la base (qui avale couleuvre après couleuvre). Le CDS tout frétillant de ses ministres au gouvernement actuel et sentant l'appel du pouvoir à venir apparaît comme une pépinière d'arrivistes et de carriéristes. Enfin, les Ecolos sont divisés et éparpillés au point que certains disent qu'il y a autant d'avis qu'il y a d'adhérents ! A chacun selon ses goûts !

Jacques Trémintin – LIEN SOCIAL ■ n°303  ■ 20/04/1995