Toutes les morts ont-elles la même valeur ?

Un attentat à la voiture piégée a frappé par deux fois, fin 2024. Cinq morts à Magdebourg, en Allemagne, le 20 décembre. Quatorze morts à La Nouvelle-Orléans, aux USA, le 31 décembre.

Le 7 février 2023, quelques heures suffirent pour que les criminels du Hamas ne massacrent 1 163 hommes, femmes et enfants.

Depuis 2 ans, si l’on s’en tient à un calcul macabre, c’est près de 47 000 êtres humains qui sont tombés, à Gaza, sous les bombes israélo-américaines. 70% d’entre eux étaient des femmes et des enfants : de dangereux terroristes, à n’en pas douter, qui menaçaient l’existence même de l’État hébreux.

Selon l’ONU, c’est 500 enfants qui meurent chaque jour, en Afrique subsaharienne, à cause du manque d'eau salubre et d'un assainissement insuffisant.

Petite question cynique : quelles sont les morts qui émeuvent le plus chacun(e) des lecteurs(trices) de ce billet ? Les victimes des attentats, les innocents massacrés par le Hamas ou ceux anéantis par l’armée israélienne ? À moins que ce ne soit les enfants africains ?

Humainement, nous devrions ressentir le même désarroi, la même révolte et la même horreur, quelle que soit l’appartenance ethnique, religieuse, nationale des victimes, quel que soit l’endroit du monde où le malheur les frappe, quelle que soit la nature de l’injustice qui a décidé de leur sort. En réalité, toutes et tous, nous sommes influencés par ce biais de proximité qui nous fait réagir en priorité face aux épreuves qui impactent celles et ceux dont nous nous sentons le plus proches spatialement, affectivement, idéologiquement. À l’inverse, moins nous nous identifions aux victimes et moins grand est notre effroi.

Non, la mort n’a pas la même valeur, selon que nous nous sentions ou non concernés. C’est vrai que nous avons plus de risques de nous représenter percuté(e)s au milieu d’une foule par un illuminé au volant d’un véhicule, que sous une pluie de bombes lancées du ciel ou bien encore de connaître la soif et de n’avoir d’autres solutions que de nous abreuver d’une eau saumâtre !

Assumer cette émotion à géométrie variable ne signifie absolument pas renoncer dorénavant à manifester notre trouble, quand un drame survient, mais peut-être prendre conscience que bien d’autres causes auraient tout aussi bien pu nous faire réagir. Et ainsi, de mesurer la part d’hypocrisie que nous partageons toutes et tous, quand notre empathie est à ce point conditionnée.