Une étoile vient de s’éteindre: chapeau bas !

Le diagnostic financier esquissé par Lien Social, début mars 2023, se sera donc avéré juste : « s’il n’y a pas d’amélioration notable de notre trésorerie, nous ne passerons pas l’été ». La saison d’été fut passée… mais pas l’hiver. Un numéro de soutien ne permettant pas de renflouer suffisamment les caisses, des abonnements en berne qui ne remontent pas, un site qui ne réussit pas à décoller, une désertion des annonceurs publicitaires, une dette qui ne cesse de s’allonger, un budget qui ne s’équilibre pas… C’est une longue agonie qui s’est terminée devant le tribunal de commerce de Toulouse le 23 novembre dernier par une décision de liquidation judiciaire. L'espace de libre expression des travailleurs sociaux vient de se rétrécir comme une peau de chagrin, nous laissant toutes et tous orphelins.

Même renié par certains de ses membres, la famille de Lien Social reste la mienne. Je veux rendre hommage à une équipe qui s’est battue jusqu’au bout, avec détermination et énergie, en déployant le meilleur d’elle-même. André Jonis aura tout mis en œuvre pour sauver son bébé qui a bien grandi, mais qui meurt dans sa 36ème année. Les journalistes, qu’ils soient salariés ou pigistes, sont restés mobilisés. Les billettistes ont aussi tenu le cap. Les professionnelles de l’arrière-cour, celles qui n’apparaissent jamais publiquement n’ont pas faibli non plus. Et puis, il y a ceux qui sont venus renforcer l’équipe aux lendemains de mon éviction. Sans oublier, bien sûr Jiho, fidèle entre les fidèles. Mais aussi les contributeurs et contributrices des différentes rubriques ainsi que les participant(e)s du Conseil de rédaction apportant leur regard critique après chaque numéro. Quand certains auraient pu quitter le navire avant qu’il ne coule, toutes et tous ont fait le choix de rester ou monter à bord pour contribuer à tenter de le sauver. Bravo !

Mais y avait-il vraiment quelqu’un qui y croyait encore ? La plupart espéraient. Seul André, spécialiste de la méthode Coué, se montra convaincu jusqu’au dernier moment, affichant une volonté d’acier, au risque de sa santé : « on va s’en sortir ». Pour les autres, sans grande illusion, ils savaient que Lien Social était en soins palliatifs. Il s’agissait de retarder la mort annoncée. Mais ils se sont quand même dévoués corps et âme !

L’aventure de Lien Social se sera avérée exaltante. J’y ai participé pendant près de trente ans, avant d’être jeté comme un vulgaire valet de ferme à qui l’on signifie du jour au lendemain son congé. Mais je ne veux en garder que le souvenir des meilleurs moments passés dans ses rangs. Finalement, par son geste pitoyable, la direction de ce beau journal m’aura épargné de veiller un moribond. Terrible consolation !

Je partage le deuil de toutes celles et de tous ceux qui endurent cette disparition. Avec la particularité de le vivre deux fois. L’ayant subi d’abord fin mars, je peux témoigner des phases qu’il empreinte. Le choc d’abord (Ko technique). Puis, vient le déni (c’est un cauchemar). C’est la colère qui s’ensuit (c’est une pure injustice). Le marchandage (cela va s’arranger). La tristesse enfin (il faut s’y résoudre : c’est fini).

Si la publication du n°1350 de Lien Social paru le 28 novembre signe la fin des jours qui étaient de moins en moins heureux et le début d’un terrible cauchemar, il restera ces milliers de pages de reportages, de contributions et de paroles de professionnels que personne ne pourra jamais nous enlever. Lien Social est mort ? Vive Lien Social !

A chacun de vos passages sur la page d'accueil, un choix aléatoire de textes archivés s’affiche :
Le masque
« La vérité sort plus facilement de l’erreur que de la confusion » Francis Bacon  Dans la file d’attente, ce jeune-homme est le seul à ne pas porter de masque. Le commerçant lui indique l’obligation imposée par la loi de se couvrir le visage. L’impétrant traite aussitôt le vendeur de menteur, affirmant que « le décret n’a pas encore été signé ». On ne peut donc l’y contraindre. Devant ...
C’est l’conseil
A l’Institut de Rééducation des Landettes, à Saint-Nazaire, les professionnels sont confrontés comme dans beaucoup d’établissement de ce type aux comportements difficiles, souvent éclatés, toujours problématiques d’enfants qu’on dit atteints de troubles du caractère et du comportement. Comment arriver à réguler ce déluge d’énergie, de tension et de virulence ? A cette question, l’équipe a ...
Armand - Séparation de fraterie
dans Interviews
« En nous séparant, vous avez détruit notre fratrie » Âgé de 20 ans, autonome et inséré, Armand a eu envie de transmettre un certain nombre de messages aux professionnels de la protection de l’enfance. Comment avez-vous été pris en charge par la protection de l’enfance ?Armand : J’ai été accompagné par un éducateur, toute la fin de mon adolescence et un peu au-delà. J’avais fugué de chez ma mère où...
L’Algérie en pointe dans la protection de l’enfance
La loi de 2015 posant un cadre juridique protecteur global en faveur de l’enfance tant en danger que délinquante va nécessiter du temps pour s’appliquer au quotidien. S’ils concernent aux trois quart les jeunes délinquants, les 150 articles de la loi 15-12, adoptée par l’Assemblée Nationale Populaire Algérienne le 15 juillet 2015, prévoient aussi la protection sociale, juridique et judiciaire ...
SDAPP - Arras (62)
Accompagner les accompagnateurs On ne peut passer tout son temps à accueillir toute la misère du monde, en restant indifférent et imperturbable. Pourtant, il est bien rare que les travailleurs sociaux puissent parler librement de leurs angoisses et leur stress. C’est ce que propose le service départemental d’accompagnement professionnel personnalisé. SDAPP, mode d’emploi. Le Pas de Calais : un...
L’exception qui confirme la règle
dans Articles
L’UNICEF- France est une association admirable, luttant depuis longtemps pour les droits humains en général et les droits de l’enfant en particulier. En cela, il faut lui rendre hommage. Mais cela ne doit pas interdire de critiquer certaines de ses prises de position, à l’image de sa charte additionnelle pour la protection de l’enfance. J’avais déjà eu l’occasion de m’offusquer, en prenant...




Comprendre la protection de l’enfance - Découvrez l’ASE comme jamais auparavant !

Ce livre démystifie l’Aide sociale à l’enfance (ASE) en répondant à 100 idées reçues. Plongez dans les aspects historiques, juridiques, sociologiques et psychologiques de cette institution essentielle. À travers les éclairages sur le fonctionnement, les objectifs, les limites et les évolutions de l’ASE, ce livre est une ressource précieuse pour tous ceux qui veulent en savoir plus sur cette administration clé de la protection de l’enfance. Découvrez les pratiques professionnelles, les défis quotidiens et les avancées de l’ASE à travers des réponses courtes, détaillées et précises.

Ce livre s’adresse principalement aux professionnels de l’action sociale et aux étudiants, mais il intéressera également les journalistes, universitaires, décideurs politiques, enfants et familles confrontés à l’ASE, ainsi que tout public désireux d’approfondir ses connaissances sur ces dispositifs souvent méconnus. Un ouvrage essentiel pour lever le voile sur cette institution discrète mais cruciale.

« Aujourd’hui à la retraite, Jacques Trémintin a accepté ce défi et il sait de quoi il parle, cette institution, il lui a consacré près de trente ans de sa carrière professionnelle. Il en connaît les arcanes, les moindres recoins. Il en connaît les hommes et les organisations, il a soutenu ses ambitions, s’est heurté à ses contradictions. Il a côtoyé tant d’enfants que ces enfants font désormais partie de lui. Il le dit lui-même, il s’est trompé parfois, il a essayé souvent, mais jamais il n’a triché. » (Extrait de la préface de Xavier Bouchereau, ancien éducateur spécialisé en AEMO, chef de service éducatif)

 « 100 idées reçues sur l’aide sociale à l’enfance » Jacques Trémintin, Éd. EHESP, 2024, 313 p.

SE PROCURE LE LIVRE


« Bienvenue sur le site de Jacques Trémintin, travailleur social qui n’a cessé d’écrire. Référent à l’aide sociale à l’enfance de 1992 à 2020, partie prenante de Lien Social de 1995 à 2023, contributeur au Journal du droit des jeunes de 1995 à 2017, pigiste dans le Journal de l’animation depuis 1999… l’accompagnement des enfants et familles, le maniement de la plume ou du clavier, l’animation de colloques ou de formations répondent au même plaisir de transmettre. Ce que fait aussi ce site, dont le contenu est à libre disposition à une seule condition : savoir garder son esprit critique et ne rien considérer d'emblée comme vrai ! »

Retrouvez les sites

du Journal de l’animation : www.jdanimation.fr
et de mon collègue et ami Didier Dubasque : www.dubasque.org