Bingo !

Au 1er janvier 2018, deux mesures sont entrées en vigueur.

Ce fut d’abord la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, le fameux ISF qui imposait les propriétés foncières supérieures à 1 300 000 euros. Nous sommes très nombreuses et très nombreux à envier le paiement de cette taxe. Si nous y étions soumis, cela indiquerait que nous serions à la tête d’une véritable fortune. Pour info, selon l’INSEE, la moitié des ménages français possédaient en 2018 moins de 117 000 euros de patrimoine (soit quand même onze fois moins que le seuil d’imposition à l’ancien ISF).

La seconde mesure fut le prélèvement forfaitaire unique, encore appelé flat tax portant sur tous les revenus du capital : les dividendes des actionnaires n’entrent plus dorénavant dans le calcul de l’impôt sur le revenu. Jusque-là les plus élevés étaient imposés jusqu’à 45 %. Les voilà réduits, quel que soit leur montant, à 30 % !

Emmanuel Macron présenta alors cet abaissement de la fiscalité du capital, comme un investissement à moyen terme : tout ce qui ne serait plus prélevé par l’Etat sous forme d’impôt pourrait être consacré par les bénéficiaires à l’investissement économique, lui-même créateur d’emplois.

Un comité d’évaluation fut constitué en décembre 2018, pour mesurer l’efficience de ces mesures. Il fut placé sous l’égide de France Stratégie, une institution sérieuse puisque rattachée directement au Premier ministre.

En 2019, son premier rapport se montra prudent : il manquait de recul pour élaborer un début de bilan.

En 2020, ce comité nota une augmentation du montant des dividendes passés de 14 milliards d’euros, en 2017 à 23 milliards, en 2018 ! On ne put que se réjouir pour les 250 000 foyers bénéficiaires. A n’en pas douter, ils allaient en faire profiter tout le monde, en investissant dans l’économie. Bon, on avait quelques doutes, mais cela allait sûrement se vérifier l’année suivante…

La réponse est enfin arrivée le jeudi 11 octobre 2021. Et là, ce fut la surprise du chef : le rapport du comité d’évaluation établit « une corrélation positive entre variation du patrimoine immobilier en 2019 et dividendes reçus en 2018 ». La réforme fiscale prétendument destinée à préserver les plus riches pour qu’ils en fassent profiter toute la société, avait surtout permis aux actionnaires d’accroître de 35 % leurs dividendes et aux plus gros d’entre eux d’utiliser cette manne pour investir certes 150 000 euros en moyenne …  mais, dans l’achat de logements.

Une fois de plus, la théorie du trickle down, traduite par l’image du ruissellement, s’est avérée un mythe, un tour de passe-passe et une escroquerie. Bien sûr, on le savait déjà. Nos gouvernants se sont-ils tirés une balle dans le pied en promettant une évaluation ? Croient-ils donc à ce point-là à leur propre fable ? Mystère !

Toujours est-il que cela fait quarante ans qu’ils n’ont cessé de nous rabâcher, qu’ils soient de gauche comme de droite, combien les dépenses sociales étaient trop élevées, combien l’action sociale devait faire toujours plus en réduisant son coût et combien l’Etat vivait au-dessus de ses moyens. Et cela fait quarante ans que les inégalités sociales ne cessent de croître, que les plus fragiles voient leurs conditions de vie se dégrader et que les travailleurs sociaux s’épuisent, en constatant année après année la difficulté croissante de leur mission.

Une fois de plus, il est démontré que ce qui pose problème, ce n’est pas l’existence de la richesse, mais sa répartition. Ce qui coûte « un pognon de dingue », ce ne sont jamais les 140 milliards d’aides aux entreprises privées ponctionnés chaque année sur le budget de l’Etat, c’est toujours l’action sociale qui coûte trop cher ! Privilégier les plus riches ou combattre la pauvreté relèvera toujours d’un choix de société ! Terminons de donner le vertige : les dirigeants des 120 plus grosses entreprises cotées en bourse ont bénéficié en 2019 d’un revenu mensuel de 200 000 euros, soit rien quand même que 238 fois le SMIC !

 

Jacques Trémintin – Site LIEN SOCIAL ■ 04/11/2021

 

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Mes livres

En mars 2023, j’ai publié aux éditions érès « Fragments de vie d’un référent ASE ». J’y décrivais, à travers 157 vignettes, le quotidien d’un professionnel de cette administration en charge dans notre pays de la protection de l’enfance 




En septembre 2024, j’ai publié aux éditions EHESP « 100 idées reçues sur l’Aide sociale à l’enfance ». Je tentais de répondre à des idées reçues, des préjugés et des contre-vérités ambiantes portant sur cette administration



En décembre 2025, je publie chez Chronique sociale « 50 nuances d’enfants en danger ». Je me lance dans de pures fictions, inspirées par ma pratique professionnelle, dans lesquelles je décris des idéal-types des situations les plus fréquentes rencontrées en protection de l’enfance. Je mets en scène un(e) mineur(e) ou jeune accompagné(e) est son accompagnateur ou accompagnatrice, chacun(e) décrivant de sa place la situation vécue. Il s’agit bien de propos imaginés, ils sont réalistes avec des personnages inventés mais crédibles.


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